mardi 4 janvier 2011

Versailles


Une passion démesurée
Les rois de France pratiquent tous dès leur plus jeune âge la chasse et plus particulièrement la chasse aux cerfs. Partout en France, des châteaux plus ou moins grands sont prévus à cet effet. Versailles région très boisée, a cet avantage d'être proche de Paris. La petite ville fait partie d'une seigneurie dont le propriétaire est Jean François Gondi, héritier d'une illustre famille florentine et premier archevêque de Paris, qui en fait l'acquisition en 1575.

Louis XIII chasse à Versailles pour la première fois en 1607 et tombe amoureux de l'endroit. Il décide en 1623 de faire construire un petit pavillon. Le 28 juin 1624, Nicolas Huau termine les travaux et le roi peut y passer sa première nuit. Au premier étage se trouvent les appartements du roi et au rez-de-chaussée ceux des gardes. Le pavillon est entouré de deux ailes qui forment les communs (cuisine, armurerie. . .). En 1631, le roi achète la seigneurie pour 100.000 livres. Le château est agrandit par Philibert le Roy.

Versailles a très mauvaise réputation à la cour. Le maréchal de Bassompierre le décrit comme un "château chétif duquel un simple gentilhomme ne voudrait point prendre vanité". Ce sentiment s'explique en grande partie par le terrain qui reste tout de même très marécageux. Louis XIII s'y rend assez souvent pour chasser, passer des troupes en revue, se détendre et travailler. De son père, Louis XIV hérite du goût de la chasse et de sa mère celui des belles manières. Mazarin lui fait découvrir l'art, Fouquet l'architecture et Colbert l'utilité politique. Le nouveau roi aime également la musique et la danse. L'idée lui vient de rassembler tout cela dans un seul et même endroit. Il ordonne de réaménager et d'agrandir le château de Versailles. Est-ce la magie du lieu, le bien être loin d'une cour surpeuplée ou un endroit tranquille pour les aventures amoureuses qui ont poussé Louis XIV a choisi cet endroit ? C'est probablement tout à la fois.

Pour les travaux, Louis XIV s'inspire très largement du château de Vaux le Vicomte appartenant à son surintendant des finances Nicolas Fouquet : l'ensemble des plafonds peints et les tapisseries de Le Brun, les jardins et pièces d'eau de Le Nôtre. Les deux fêtes de 1660 et 1666, ont contribué à donner des idées au roi. Insensiblement, l'idée fait son chemin. Louis XIV veut une maison qui lui ressemble et il se donne les moyens pour y parvenir. Il reprend l'équipe qui a travaillé à Vaux le Vicomte et dessine lui-même les plans. Le 6 mars 1682, il s'installe à Versailles encore en plein chantier. La cour et la ville de Paris, s'attache à détourer le roi de cette région. Colbert est farouchement opposé à ce dessein, mais finit par céder. Louis XIV tient absolument à garder le château construit par son père. Il oppose une forte volonté pour venir à bout de son entreprise.



Les étapes de la construction
Le premier grand moment de travaux commence en 1661 et dure quatre ans. Les communs de Louis XIII sont agrandis et ornés des statues des quatre éléments. L'ancien château demeure, mais il subit des modifications côté jardin. L'étage est doté d'un balcon de fer doré, les lucarnes se transforment en mansardes et les ornements se dorent. A l'intérieur, les appartements sont redistribués. Le Nôtre redessine les jardins. Le parterre occidental s'allonge vers un parc symétrique où se dressent des allées, des bosquets et des labyrinthes. Le parterre du midi domine une orangerie tandis qu'à l'Ouest on construit une ménagerie.

Le deuxième moment commence 1668. Tout d'abord, Le Vau construit une enveloppe qui ménageant les cours intérieures, s'appuie sur les quatre pavillons. Le vieux bâti n'est toujours pas détruit. Il reste visible côté ville. En revanche de l'autre côté, il est enchâssé dans une nouvelle façade. En 1670, Le Vau meurt et est remplacé par François d'Orbay. A l'étage se trouvent les grands appartements constitués en enfilade de salons dédiés aux planètes qui gravitent autour du soleil. Ceux ci sont aménagés par Le Brun. Les deux grands appartements du roi et de la reine communiquent par une terrasse peu étanche. Dès 1669, la recouvrir semble inévitable. Sur ordre du roi, Hardouin-Mansart et Le Brun édifient la galerie des glaces. Celle ci est longue de 76m et plaquée de marbre. Elle couronne avec ses miroirs qui reflètent chacune des hautes fenêtres, la magnificence du lieu. Sur la voûte, Le Brun célèbre les gloires du début du règne de Louis XIV.

Au fur et à mesure des aménagements du château, cinq chapelles ont existé. En 1665, la première est située dans le petit pavillon d'angle Nord-est. En 1672, elle occupe l'actuelle salle des gardes de la reine et en 1676 celle de la garde du roi. En 1682, on bénit celle qui vient d'être construite entre l’extrémité du grand appartement du roi et le salon d'Hercule. Le 5 juin 1710, le Cardinal de Noailles consacre la dernière, commencé par Hardouin-Mansart et achevé par Robert de Cotte. Construite dans la tradition des chapelles palatines, elle communique avec les appartements du roi au premier étage.

Aux parterres de broderies végétales qui entouraient le château de Louis XIII, Le Nôtre substitue un grand parc ouvert construit sur deux axes, l'un en longeant le château et l'autre s'éloignant dans la perspective du grand canal (1520m). Le tout est entrecoupé de nombreux vases, statues et fontaines. Au Nord du canal, Louis XIV confie à Le Vau la transformation du hameau de Trianon en une résidence de plaisance. En 1670, François d'Orbay construit cinq pavillons recouverts de carreaux de porcelaine. Celui ci est remplacé en 1687, par le Trianon en marbre d'Hardouin-Mansart. Louis XV cherche à rendre plus confortable et plus chaleureux les appartements. Au marbre se substituent des ensembles plus petits et raffinés composés de boiseries blanches et dorées. Autour des cours intérieures s'empilent ainsi étages et entresols relayés par de nombreux escaliers. Louis XV répugne d'amputer l'œuvre de son grand-père, mais l'escalier des ambassadeurs en trop mauvais état est détruit en 1752.

L'opéra voit enfin le jour. Après le manège de la petite écurie et la salle de comédie de la cour des princes, le théâtre commencé en 1763 par l'architecte Gabriel est inauguré. A côté de Trianon, Louis XV fait bâtir en 1750 une salle de jeu et en 1759 le petit Trianon destiné à Mme de Pompadour. Il est inauguré en 1770 par Mme du Barry. En 1774, Louis XVI en fait don à Marie Antoinette qui fait réaménager les jardins et construire son hameau. Ce dernier constitue une véritable petite exploitation agricole au temps de la redécouverte rousseauiste de la nature. Ce sera là l'ultime étape de la construction du domaine royal.


La vie côté cour et côté jardin
En 1679, Louis XIV signe l'édit de fondation de Versailles, par lequel il fait don des places à toutes personnes qui voudraient bâtir à la charge d'entretenir les bâtiments dans le même état de symétrie. Voici comment naît l'urbanisme de la ville de Versailles. Les nobles s'empressent d'y construire leur hôtel faisant augmenter les prix. A côté du jardin sont construits les écuries et le grand commun (lieu lié à la nourriture et aux appartements des domestiques). Un potager est également créé.

A la fin du règne de Louis XIV, Versailles est endeuillé par les guerres et les décès dans la famille royale. Sous l'influence de Mme de Maintenon, l'ambiance devient plus dévote. Plus tard, la timidité de Louis XV et ses nombreux voyages finiront d'affaiblir la cour. La noblesse ne la quitte pas bien sûr, puisqu'elle reste le lieu privilégié pour obtenir des charges et des faveurs. Toutefois, ils sont de plus en plus à louer une chambre au château et à retourner à Paris dès leurs affaires finies. A l'intérieur du château, le roi de France naît, vit et meurt en public et la vie quotidienne est un opéra parfaitement orchestré. Les appartements du roi sont ouverts à tous les nobles, domestiques et ouvriers-artisans. Les journées sont réglées suivant une étiquette stricte : lever, entrée, travail, messe, travail, dîner, promenade, messe, travail, souper, divertissements, coucher). C'est une journée somme toute équilibrée, mais lourde où le roi n'a pas une minute à lui et où il ne voit guère sa famille. Les courtisans guettent le roi dans les grandes galeries en vue de se faire bien voir et d'obtenir une faveur. Mais la somptuosité de Versailles se révèle aussi à travers toute l'Europe. En effet, le roi reçoit en audience les ambassadeurs étrangers qui sont autant de manifestations de la splendeur et de la grandeur du roi. Il existe également surtout à partir de Louis XV, des pièces plus privées où seuls sont admis les proches et les élus. On les appelle des antichambres.

Les reines de France ont à Versailles une vie officielle et discrète. Si Marie Thérèse d'Autriche vit peu à Versailles étant morte quelques ans après la fin des premiers travaux, la vie de Marie Leszcynska se déroule officiellement dans son grand appartement. Les reines ont une étiquette très semblable à celle du roi. Marie Antoinette, quant à elle s'entoure d'une véritable cour où se mélange danse, musique, littérature et théâtre. Les enfants habitent dans l'aile du midi. Ils doivent se plier à une dure discipline et à une stricte étiquette. Les maîtresses du roi ont aussi leur place à Versailles. Elles sont très courtisées par les nobles qui cherchent à obtenir des faveurs. Louis XIV va chercher conseils et repos auprès de Mme de Montespan puis de Mme de Maintenon, Louis XV auprès de Mme de Pompadour et de Mme Du Barry.



L'art monarchique
Louis XIV encourage les artistes par des pensions. Colbert crée ou réorganise les grandes institutions artistiques et scientifiques. Dans le domaine scientifique, il désire encourager la recherche, facteur de prospérité pour la France. Dans le domaine artistique, il désire discipliner l'art par un enseignement fondé sur l'imitation des anciens pour la gloire du souverain. L'Italie reste la terre des artistes, même si le Nord (Flandres ; Provinces-Unies) commence à se démarquer. Jusqu'au XVIIIe siècle, l'art est italien. A son tour le Nôtre doit domestiquer la nature. Aux thèmes antiques, il juxtapose l'exotisme avec l'orangerie, la ménagerie et ses grottes.
Versailles est un véritable musée d'art ouvert en plein ciel. Face à l'Europe, un ensemble de pièces clament l'excellence des artistes français et l'infinitude de leurs œuvres. L'antique et le grand décor italien restent la référence. On y retrouve les thèmes de la mythologie grecque. Il existe également tout un programme politique qui vise à montrer à l'Europe la grandeur de la France et de son roi. Au XVIIIe siècle, se développe un autre style de vie basé sur le bonheur et la douceur de vivre. Cela se ressent sur l'art et la cour.



Un manifeste politique ou un temple de l'histoire ?
Sous Louis XIV, Versailles devient la capitale de la France, mais peut-on considérer que l'installation du gouvernement a été le fruit d'une longue préméditation ? Louis XIV n'a véritablement sa chambre officielle qu'en 1701. Quant à son emménagement en 1676, il se fait dans un véritable chantier. Louis XIV en tant que roi a compris l'importance de la communication de la politique. C'est la magnificence de Versailles et les fastes de la cour, qui montrent la richesse de la France et la puissance de son roi.

Versailles incarne la nation. Une nation dont il faut rappeler l'immémorabilité. Une nation connue jusqu'aux extrémités du monde. Dès 1678, le règne de Louis XIV est suffisamment glorieux pour que le roi puisse se passer des références aux héros grecs et aux empereurs romains. Les dernières commandes de Louis XIV n'ont plus rien à voir avec l'Antiquité. Dorénavant ce sont des lieux ou des évènements contemporains qui sont représentés. Sous ses successeurs, l'identité entre l'homme et le roi et entre le roi et Versailles s'amenuise. Dans les esprits, Versailles reste le château de Louis XIV et est synonyme de l'absolutisme. L'ouverture des états généraux le 4 mai 1789, est le dernier grand spectacle offert à Versailles sous la monarchie.

La Révolution ne détruit pas ce monument chargé de sens. Elle se contente de le vider. Tout est envoyé dans les musés parisiens. Le château sera utilisé par Napoléon Ier comme annexe des Invalides. Louis Philippe veut recréer dans un vaste musée l'histoire de France et ainsi asseoir sa légitimité. Il fait entreposer dans les galeries de Versailles toute une série de tableaux regroupant les grands évènements de la nation. Napoléon III et la Troisième République compléteront les collections. Depuis 1875, le Sénat et l'Assemblée Nationale se retrouvent à Versailles, afin de discuter des questions importantes comme la rédaction de la constitution. Si la France veut honorer un visiteur, c'est à Versailles qu'elle le fait. Comme l'a voulu Louis XIV, Versailles est un chef d'œuvre voué au service de la France.


" Il est allé à cinq heures du soir à Versailles, où on lui prépare comédies, ballets, parades"
Jean le Rond d'Alembert
"


Source
Texte : CONSTANT. Claire, Versailles
Image : hgec.wordpress.com

lundi 3 janvier 2011

Les Templiers

Les pauvres chevaliers du Christ
Le 15 juillet 1099, Jérusalem tombe aux mains des croisés lors de la Première croisade. L'avancée rapide des Arabes et l'impossibilité qu'ont les chrétiens de venir en pèlerinage sur le tombeau du Christ, lève l'indignation dans toute l'Europe. Des marées humaines avec l'accord du pape se mettent en route. La création du Royaume de Jérusalem n'a pas sécurisé la région.

En 1118, le champenois Hughes de Payns regroupe ses compagnons au sein d'un ordre appelé les pauvres chevaliers du Christ. Ils se donnent pour vocation d'assurer le service et la défense des pèlerins. Leurs services sont très appréciés et Baudouin II leur donne le temple de Salomon comme quartier général. Ils prennent ainsi le nom de templiers.

En 1128, Hughes de Payns se rend à Rome pour solliciter du Pape une reconnaissance officielle et établir une règle propre à leur vie. Un concile se réunit le 13 janvier 1129 à Troyes. L'ordre est divisé en grade militaire. La tenue est réglementée : une robe blanche. La croix rouge viendra plus tard. A la tête de l'ordre se trouve le maître. Il est le garant des règles. Il est assisté d'un conseil et de son lieutenant, le sénéchal. Les templiers sont des chevaliers, qui assurent une mission de protection. Le reste du temps, ce sont des moines qui respectent le serment de pauvreté, de chasteté et la prière.


Gens d'épée et gens d'église
Les templiers sont implantés à Jérusalem, Tripoli, Antioche, ainsi que dans un grand nombre de provinces occidentales. Chaque confrérie a à sa tête un maître. Leur nombre augmente, grâce aux donations. A la fin du XIIIe siècle, on compte 9.000 commanderies en Europe dont 3.000 en France.

Les commanderies d'Europe sont avant tout des exploitations agricoles, dotées de chapelles. Les commanderies fortifiées se trouvent essentiellement en Espagne et au Portugal. Les souverains espagnols ont fait appel aux templiers pour se protéger de la menace sarrasine. Les constructions élevées en Orient témoignent toutes du caractère prioritairement militaire de l'ordre. Des villes entières sont parfois confiées à la surveillance du Temple. C'est au XIIe siècle que sont bâties les forteresses comme Châtel-Pelerin.

La vie des templiers se présente sous deux aspects, qui sont d'ailleurs l'un et l'autre familiers de la société féodale. Ceux en Orient ont une fonction militaire, puisqu'ils protègent les pèlerins et participent même à des batailles. Ceux en Occident sont des exploitants, veillant aux récoltes et font parvenir leurs vivres aux commanderies d'Orient. Leur vie quotidienne est copiée sur le modèle cistercien basé sur l'austérité dans le bâti, le vêtement et accordant une grande place au travail de la terre.


La défense de la Terre Sainte
La chute d'Edesse en 1144 marque le début de la seconde croisade, dirigée par le roi de France Louis VII et l'empereur Conrad III, mais pour diverses raisons celle ci échoue. Louis VII perdu en Syrie décide de se mettre sous la protection du Temple, qui l'aide à organiser sa retraite.

Très tôt, les templiers sont accusés de mener une politique personnelle. En 1168, l'ordre refuse de s'associer au roi de Jérusalem contre l'Egypte. Ils s'opposent aux hospitaliers fondé en 1113 et ayant les mêmes prérogatives. Vers 1185 alors que les Etats Latins d'Orient sont menacés par Saladin, le Flamand Gérard de Richefort devient le nouveau grand maitre du Temple. C'est un chevalier errant venu en Terre Sainte pour y chercher la gloire et l'argent. Il affronte les armées musulmanes à Caral. Son armée est encerclée et Saladin massacre tous les templiers, mais laisse la vie sauve à Gérard de Richefort. Il est accusé d'avoir causé cette défaite. Il est ratier de l'ordre. C'est Robert Sable, un proche de Richard Cœur de Lion, qui le remplace. Les templiers sont au côté du roi d'Angleterre lors de la troisième croisade. Ils prennent également part à la campagne menée par le roi de Jérusalem en Egypte.

Lors de la sixième croisade menée par Frédéric II, les templiers sont en conflit avec l'Ordre des Chevaliers Teutoniques, un autre ordre remplissant les mêmes fonctions. Tous leurs membres sont allemands et servent l'empereur. Les deux ordres sont en concurrence, d'autant plus que Frédéric II a été excommunié. Avec les hospitaliers, ces deux ordres ont des conquêtes politiques et territoriales, se traduisant par des alliances avec les divers royaumes latins.

Les templiers s'allient à Saint Louis lors de la septième croisade. Le roi de France est capturé, puis libéré contre une rançon. Il se remet en route, libère des forteresses, renforce les royaumes en cassant des traités passés entre les templiers et le sultan de Damas. L'ordre du Temple y gagne une réputation d'orgueil et d'insubordination. Saint Louis repart en 1254. A partir de cette date, les conflits avec les hospitaliers reprennent. Ils sont renforcés par les deux puissances maritimes italiennes. En effet, les templiers sont soutenus par Venise et les hospitaliers par Gênes. En 1280, la situation des Etats Latins d'Orient est désespérée. Les Mamelouks ont repris l'ensemble des territoires. La réunion des deux ordres arrive trop tard et ceux qui ne sont pas enfuis, sont massacrés.


Vers la ruine du Temple
Fin XIIIe siècle, les templiers ne sont plus présents au Proche Orient. Ils ont donc perdu leur vocation de protection des pèlerins, contrairement aux hospitaliers, qui se sont reconvertis dans la gestion des hôpitaux et l'aide aux malades. Leur impopularité grandit de jour en jour. Ils sont exempts de toutes taxes, échappent à la justice séculaire et possèdent de nombreux domaines. Par ailleurs, les pèlerins au moment de leur départ, confient leur argent aux templiers contre des échanges en bon du trésor. Cela permet aux pèlerins de disposer de numéraire sans le transporter avec soi. Les templiers sont devenus des banquiers et des financiers. Le Temple de Paris recueille les finances royales. Il est l'ancêtre de la Chambre des Comptes. En 1295, une partie du Trésor est transporté au Louvre et mis sous la gestion de banquiers florentins.

Le 13 octobre 1307, tous les templiers de France sont arrêtés par ordre de Philippe le Bel. Cette opération est préparée de longue date et tenue secrète. Trois milles commanderies sont investies par les baillis et les sénéchaux, le même jour et à la même heure. Le roi de France sait qu'il n'a rien à craindre du Pape. Bertrand de Got est institué le 5 juin 1305, sous le nom de Clément V. C'est un français, archevêque de Bordeaux. Le nouveau pape refuse de rester à Rome, déchirée par des rivalités politiques. Il évite d'ailleurs de justesse un attentat. Il prend la décision de déplacer la cour pontificale en Avignon.


Les templiers au bûcher
Dès le départ, les templiers sont accusés d'outrages à la personne du Christ et de rites obscènes. Ils adorent Baphomet, une ancienne divinité païenne. Philippe IV envoie des lettres dans toute l'Europe pour inciter les autres monarques à arrêter les templiers. Il ne reçoit aucune réponse. Seuls les templiers résidants en France sont inquiétés.

Les templiers sont mis à la question. Sur 138 membres, 38 meurent et seulement trois avouent les faits. Le 17 octobre 1307, Clément V réunit les cardinaux et assure les templiers de sa protection. Néanmoins, un mois plus tard, il change d'avis et ordonne l'arrestation de tous les templiers. Il déclare que l'affaire doit comparaitre devant les tribunaux ecclésiastiques. Le 25 mars, le roi convoque les Etats Généraux à Tours et obtient la poursuite du procès. Le pape envoie des cardinaux chargés de refaire les interrogatoires. Ces derniers confirment les aveux. Clément V décide avec Philippe IV de créer des commissions spéciales.

Le 26 mars 1309, Jacques de Molay, grand maitre du Temple, comparait. Il nie les faits et réfute sa déposition. Le 11 mai 1311, 54 templiers sont condamnés à mort. Le 16 octobre, un vaste concile se réunit à Vienne dans le comtat Venaissin, pour régler l'affaire, mais le roi interdit aux templiers de s'y rendre. Quant à lui, il demande la suppression de l'ordre. Clément V entérine cette décision et ordonne que les possessions des templiers reviennent aux hospitaliers. Philippe IV ne peut pas mettre la main sur cet héritage comme il l'avait espéré. Le 22 décembre 1312, Clément V délègue ses pouvoirs à trois cardinaux profrançais. Ces derniers prononcent la condamnation à mort des grands dignitaires de l'ordre.

La mort du pape, le 19 avril 1314, puis celle du roi, le 20 novembre bouleverse le peuple. Ainsi nait la légende de la malédiction de Jacques de Molay. Nulle part en Europe, les accusations de Philippe IV sont relevées. L'ordre dissout les membres restants rejoignent d'autres confréries.



" On accusait les templiers de réunir tous ce que l'on reprochait à ces deux professions : les débauches, la cruauté du guerrier et l'insatiable passion d'acquérir qu'on impute à ces grands ordres qui ont fait vœu de pauvreté."
Voltaire


Source
Texte : PERNOUD. Régine : Les Pauvres Chevaliers du Christ
Image : rennes-le-chateau-archive.com