mercredi 1 décembre 2010

Louis XIV


Apprendre le métier de roi
Le 8 septembre 1638, le dauphin Louis vient au monde. Cette naissance que l’on attendait, est saluée dans tout le royaume comme une bénédiction. L’enfant est ainsi surnommé Dieudonné. Il est baptisé le 21 avril 1643. Le 14 mai 1643, Louis XIII meurt à Saint Germain en Laye et le jeune Louis devient roi.

Anne d’Autriche sa mère, assure la régence avec le cardinal de Mazarin. L’abbé Péréfixe devient le précepteur du roi. Louis XIV reçoit une éducation littéraire (latin, français, histoire), scientifique (mathématiques), artistique (musique, danse), sportive (chasse, escrime) et religieuse.

Dès l’âge de 10 ans, Mazarin initie le roi aux affaires de l’Etat, puis le fait assister au conseil. Le 5 juin 1649, lors de l’insurrection parisienne appelée la Fronde, il quitte précipitamment le Louvre en pleine nuit. Le 7 novembre 1651, Louis est proclamé majeur à l’âge de 13 ans. Le 7 juin 1654, il est sacré à Reims, puis en 1660 il épouse Marie Thérèse d’Autriche, fille du roi d’Espagne.


Gouverner son royaume
Mazarin meurt à Vincennes le 9 mars 1661. Le lendemain, Louis XIV réunit un conseil exceptionnel, où il annonce sa prise du pouvoir effectif et qu’il entend gouverner seul avec ses conseillers. Il s’entoure de Michel le Tellier pour la guerre, de Hughes de Lionne pour les affaires étrangères et de Colbert pour les finances.

Colbert entend bien se débarrasser de son rival Nicolas Fouquet le surintendant des finances de la Reine Mère. Fouquet est chargé de trouver de l’argent pour financer la guerre contre l’Espagne. Pour cela, il a confié à des financiers la collecte des taxes indirectes et directes, ce qui accroît la pression fiscale. Le 11 août 1661, Fouquet invite le roi à une fête dans son château de Vaux le Vicomte, pour redorer son blason sali par Colbert. Jaloux de la puissance du surintendant, Louis XIV le fait arrêter par d’Artagnan deux mois plus tard et il est condamné à l’exil. Louis XIV communie cette peine en détention partielle à la forteresse de Pignerol, où Fouquet meurt en 1680. Il est immédiatement remplacé par Colbert.

Pour mieux contrôler, Louis XIV a volontairement limité le nombre de ses collaborateurs, ce qui a pour conséquence le cumul des fonctions et la concentration de celles ci par quelques grandes familles. Les Colbert dirige les finances, la Marine, la Maison du roi. Son fils, le Marquis de Seignelay un poste de secrétaire d’Etat. Le Marquis de Louvois, fils de le Tellier, s’installe au ministère de la guerre et succède à son père en 1677. Les grandes familles constituent des réseaux d’amis et de clientèles. Louis XIV prend le gouvernement en main à un moment où les traités de Westphalie et des Pyrénées, assurent à la France une situation exceptionnelle, qui tient autant à sa propre puissance, qu’à l’effacement de ses rivaux. L’Espagne est affaiblie par l’indépendance des Provinces-Unies, par des révoltes et la séparation de l’Autriche.


S’enivrer de gloire
Colbert a à cœur de remettre de l’ordre dans les finances en améliorant la fiscalité. En 1662, est créée une chambre de justice s’occupant des fraudes fiscales. Colbert a la conviction que la richesse d’un Etat se mesure en numéraire. Il faut donc vendre plus que l’on achète. Il s’inspire des doctrines mercantilistes. Il se concentre sur la production manufacturière et favorise la création de manufactures d’Etat, comme celle des Gobelins à Paris, et des manufactures royales. Ces dernières sont dirigées par des particuliers soutenus financièrement par le roi. Pour améliorer les transports, des efforts sont faits pour aligner les droits de douane et des canaux sont creusés. Colbert en tant que secrétaire de la Marine, favorise les chantiers navals et crée une compagnie de commerce, fortement concurrencée par les Provinces-Unies. Toutefois, les ports de l’Atlantique et de la Manche connaissent de forts développements.

Dans le même temps, Colbert envoie le Seigneur de Carignan pour soutenir les colons québécois contre les Iroquois. Il donne au pays une structure administrative d’une province, avec un gouverneur, un parlement et des intendants. Il favorise le peuplement par l’envoi de femmes à marier et de missionnaires évangélisateurs. Il opère de même aux Antilles.

Tous les talents doivent être mis au service de Louis XIV. L’Académie des sciences est fondée en 1666, puis suit la création de l’Opéra de Paris. Durant la même année, Louis XIV devient le protecteur de l’Académie Française, favorisant la littérature et le théâtre. Louis XIV est un danseur accompli. Il danse lui même sur scène. Avec l’appui du Florentin Lully, il acclimate en France, l’opéra italien.

En 1671, Lully devient directeur de l’Académie royale de musique. Plus que dans l’architecture, c’est dans l’opéra que transparaît au mieux le caractère baroque du règne. Le roi attend des artistes qu’ils travaillent à sa gloire. Les diverses résidences royales doivent dans leur architecture, leur décoration, leur mobilier, leur jardin, l’emporter sur tout ce qui se fait de mieux dans le monde. Dans toutes les grandes villes, se dressent des arcs de triomphe et des places royales. En 1671, Colbert crée l’Académie d’architecture, qui dispense un enseignement spécialisé et envoie ses meilleurs élèves parachever leur formation à Rome. Le classicisme se traduit par l’imitation de l’Antiquité, auquel s’ajoute la clarté, la rigueur, le rendu majestueux et le grandiose. En sculpture et en peinture, les allégories mythologiques sont plus que jamais à la mode. Toutefois, le classicisme n’exclut pas une forme d’ouverture à l’art du mouvement, de l’exubérance et de l’irrationnel qu’est le baroque.

Grâce à le Tellier, Louis XIV se forge peu à peu une armée à la mesure de ses ambitions. L’armement est modernisé. Les fantassins sont équipés du fusil à pierre, puis de la baïonnette. Vauban dresse de puissantes fortifications le long des frontières du royaume. Colbert et Seignelay dotent le royaume d’une marine.

La guerre contre les Provinces-Unies est soigneusement planifiée. La France s’est assurée la neutralité de l’Angleterre, de la Suède et de l’Empire. Le 6 avril 1672, la guerre est déclarée. Face à l’avancée des Français, les Néerlandais ouvrent les digues du Rhin et inondent les plaines autour d’Amsterdam. Guillaume d’Orange signe une alliance avec l’Espagne et l’Empire. Louis XIV envahit la Franche Comté redevenue espagnole en 1668. Les principales places fortes des Pays-Bas sont occupées. Turenne envahit l’Alsace, mais meurt dans une bataille. En 1678, une paix est signée à Nimègue. L’Espagne perd la Franche Comté et douze places fortes en Flandres.


Choisir la fermeté
Le 6 mars 1682, la cour quitte Saint Germain en Laye pour s’installer à Versailles. Le château de Versailles est le lieu de la mise au pas de la haute noblesse, du développement d’une culture de cour, de l’exaltation du pouvoir monarchique. Il sert de modèle aux autres cours européennes.
La vie du roi est au centre de Versailles et ordonne le cérémoniel de cour. De son mariage avec Marie Thérèse, il ne lui reste qu’un fils né en 1661 appelé Louis. En outre, Louis XIV a des enfants issues de ses unions avec deux de ses maîtresses Mme de la Vallière et Mme de Montespan, qu’il a installé à la cour, au mépris de son devoir de chrétien comme le lui rappelle constamment Bossuet. Il fait légitimer les fils de Mme de Montespan et leur accorde par le Parlement le statut de prince du sang.

Louis XIV influencé par Mme de Maintenon, qu’il aurait secrètement épousée après la mort de la reine, devient de plus en plus dévot. Pour lui, ses sujets doivent tous être de bons catholiques. En ce sens, il exalte les évêques à mener une politique active de conversion des protestants, soutenue par la Caisse des Conversions fondée en 1676 par Pellisson. Louis XIV cherche à renforcer son prestige auprès des puissances catholiques, entaché par ses conflits avec le Pape et par la victoire de Léopold Ier contre les Turcs à Vienne. Le durcissement de l’attitude du roi se traduit par une centaine de déclarations, arrêts et règlements sur le sujet. A la violence légale, s’ajoute la violence physique. En 1681, il instaure la pratique des dragonnades par le biais de Marillac. Elle consiste à loger des soldats chez les protestants. Louis XIV ignore dans quelles conditions sont obtenues les conversions et qu’il subsiste encore de nombreux protestants. Le18 octobre 1685, il signe à Fontainebleau la révocation de l’Edit de Nantes. Les pasteurs doivent quitter le royaume et le culte est interdit. L’émigration est interdite aux réformés sous peine de galère. Les protestants ou nouveaux convertis s’opposent par une résistance passive, en refusant de se rendre à la messe, en continuant le culte clandestinement ou en quittant la France.

Entre 1678 et 1688, la paix règne et l’économie prospère. Louis XIV décide alors d’appliquer la politique dite de réunion, qui consiste à récupérer toutes les régions ayant appartenu à la France entre 1648 et 1678. Il envoie 30.000 hommes occuper Strasbourg. Il empêche les révoltes en promettant le maintien du culte protestant. Les diverses annexions suscitent l’inquiétude des autres pays. L’Espagne déclare de nouveau la guerre à la France, mais signe rapidement la paix, n’ayant aucun soutien. Louis XIV bombarde Gênes pour la punir d’avoir héberger des vaisseaux espagnols. En 1687, la rupture avec Rome est consumée, suite à la suppression des franchises dont jouissent les ambassadeurs du Saint Siège. L’affaire de l’électeur de Cologne, dont le candidat a été soutenu par le Pape contre celui soutenu par la France, pousse Louis XIV à s’emparer d’Avignon et du Comtat Venaissin, puis de Liège. Les membres de la Ligue d’Augsbourg (Espagne, Empire, Suède) rompent leurs relations diplomatiques avec la France. Louis XIV déclare de nouveau la guerre aux Provinces-Unies, mais entre temps Guillaume d’Orange est devenu roi d’Angleterre et pousse son pays d’origine à rejoindre le côté de la Ligue d’Augsbourg.


Trop aimer la guerre
Louis XIV mène la guerre en Allemagne. Conscient de la suprématie de la marine anglo-néerlandaise, il laisse le soin aux corsaires d’arraisonner tous les bateaux ennemis. La guerre se déroule aussi en Italie sur les terres espagnoles. En 1697, le traité de paix de Ryswick est signé, les belligérants étant à court d’argent. Louis XIV accepte de reconnaître Guillaume d’Orange comme roi d’Angleterre et rend tous les territoires annexés depuis 1678, à l’exception de Strasbourg.

Se pose également le problème de la succession d’Espagne. Le roi Charles II n’a pas de fils et est gravement malade. Louis XIV de par son mariage peut revendiquer la couronne, mais il faut pour cela avoir l’accord de Charles II et de l’Empereur. Ce dernier préfère que ce soit son fils qui prenne la couronne d’Espagne. Charles II veut maintenir l’intégrité de son héritage. Le 2 octobre 1700, Charles II interdit tout partage de l’héritage et donne la couronne à Philippe d’Anjou, à condition que celui ci renonce à ses droits sur la couronne de France. Quand Charles II meurt, Louis XIV annonce publiquement la décision d’accepter le testament. L’Empereur le conteste et déclare la guerre. Le roi d’Angleterre Guillaume III réussit à former une nouvelle ligue avec l’Empereur et les Provinces-Unies.

Dès 1705, l’armée française connaît des défaites. La Catalogne est occupée par les Anglais et Lille par les Néerlandais. En 1711, l’Empereur Joseph Ier meurt. Son fils Charles se fait couronné roi d’Espagne recréant ainsi l’empire de Charles Quint. Cette situation est intolérable pour les autres puissances d’Europe. Les Provinces Unies et l’Angleterre se retirent du conflit. Laissé seul, L’Empereur Charles III signe la paix de Rastadt. Philippe d’Anjou est reconnu roi d’Espagne, la France récupère la Catalogne, mais doit céder à l’Empire les Pays-Bas, le Milanais, la Sardaigne et Naples, aux Anglais Gibraltar.

Ce retour à la paix marque pour les Français la fin des épreuves (famine, disette, fiscalité élevée, épidémies). En 1712, Louis XIV voit ses trois fils mourir de maladie. Son unique successeur est son petit fils âgé de 4ans. Louis XIV a 75 ans et est très fatigué. Le 9 août 1715, il se plaint d’une douleur à la jambe gauche. C’est la gangrène. Il décède le 1er septembre, peu regretté de son peuple à cause des sommes exorbitantes pour financer la guerre, des taxes considérablement élevées, et par la trop longue durée de son règne, la plus longue de l’histoire de France.








SOURCE
Texte : LEBRUN. François : Le Siècle de Louis XIV
Image : burell9history.wimispace ; Civilization 4

mardi 30 novembre 2010

Jeanne d'Arc

De Domrémy à Chinon
En 1400 après la mort du roi anglais Richard Cœur de Lion, époux d'Isabelle fille du roi de France, débute la Guerre de Cent Ans. Elle est menée par les Lancastre, qui ont pris le pouvoir en Angleterre. Ils espèrent trouver une légitimité à leur pouvoir en se lançant dans la conquête de la France gouvernée par Charles VI. Après s'être allié avec le Duc de Bourgogne, le roi anglais débarque en Normandie et remporte la bataille d'Azincourt. Il prend Rouen en 1415 et fait son entrée dans Paris en 1418. Par le traité de Troyes du 21 mai 1420, il obtient la main de Catherine de France et la promesse de succéder à Charles VI.

En 1422, les deux rois meurent. En Angleterre, c'est le Duc de Bedfort, frère du roi qui prend le pouvoir sous le nom d’Henri V. Il se nomme lui-même régent de France. En 1428, les Anglais décident d'attaquer Orléans, afin de contrôler la Loire et de s'emparer du fils de Charles VI retranché à Bourges.

C'est dans ce contexte que naît en 1412 Jeanne, dans un petit village de la Meuse nommé Domrémy. Elle est la cinquième enfant de Jacques d'Arc et d'Isabelle Romée. C'est à l'âge de 16 ans qu'elle commence à entendre des voix. Celles ci lui racontent dans quelle misère se trouve le royaume de France et l'exhorte à secourir le roi. Cet appel se renouvelle plusieurs fois.

En 1428 sous prétexte d'aller aider la femme de son cousin demeurant à Vaucouleurs, Jeanne va trouver le seigneur Robert de Baudincourt. Devant l'obstination de la jeune femme, ce dernier décide de lui donner une escorte, afin qu'elle aille rencontrer le roi à Chinon. Parmi l'escorte se trouve Jean de Metz et Bertrand de Poulengy, qui seront ses plus fidèles lieutenants. Elle part le 13 février 1429.

Le groupe met onze jours pour rejoindre Chinon. Un record pour l'époque, d'autant plus qu'il leur fallait éviter les soldats anglais. On annonce l'arrivée de Jeanne au roi. Ce dernier prend conseil. Faut-il recevoir et écouter cette jeune fille ? Jeanne doit attendre deux jours avant que le roi ne se décide à la recevoir. Elle lui raconte pourquoi elle est là. Le roi l'attire un peu à l'écart de la cour et lui chuchote plusieurs choses à l'oreille. Par la suite, il lui donne un logement. Toutefois, Charles VII reste prudent. Il réunit à Poitiers une grande assemblée de théologiens dans le but de savoir si ce que dit Jeanne est vrai. L'enquête dure trois semaines et se révèle positive.

Immédiatement, le roi l'envoie à Orléans. Elle part pour Tours, où elle reçoit un équipement complet et dessine son propre étendard. La voilà dorénavant chef de guerre.


Orléans
En 1428, Orléans est complètement assiégée par les Anglais. Seules les voies de communication vers l'Est sont encore libres. Jeanne arrive sur les lieux le 22 avril 1429 et rencontre le commandant en chef Jean d'Orléans. Ce dernier l'invite à rentrer dans la ville ce qu'elle fait. Elle est chaleureusement acclamée par les habitants, qui voient en elle l'espoir qu'ils avaient perdu.

Jeanne est impatiente de combattre et le fait savoir, mais Jean préfère rassembler ses forces et attendre des renforts de Blois. Une semaine plus tard, elle fait son premier combat. Les Anglais tentent de couper la dernière route. Jeanne envoie plusieurs messages aux Anglais pour leur demander de se retirer, ce qui les amusent bien. Le 6 mai, les Français s'emparent des castines les moins défendues. Les Anglais préfèrent reculer devant le nombre important de soldats français. Jeanne est présente, ce qui galvanise les troupes. Au cours de la journée, ils gagnent du terrain. Le lendemain, Jeanne reprend les combats. L'assaut a lieu sur la bastide des Tourelles, qui bloque le pont permettant de traverser la Loire. Le résultat est peu convaincant. Jeanne est blessée. Une fois remise sur pied et ses hommes reposés, elle reprend l'assaut, qui cette fois réussit.

Le dimanche, les Anglais se rassemblent, prêts à combattre. Les Français font de même. Les deux armées face à face ne bougent pas. Jeanne refuse d'attaquer un dimanche, préférant uniquement se défendre si cela est nécessaire. Finalement, les Anglais se replient. Plusieurs jours plus tard, ils lèvent le camp. La ville est libérée.


Reims
Avant d'entreprendre un voyage à Reims, il faut protéger la région de la Loire. Le roi confie le commandement à Jean d'Alençon. Jeanne est son second. La campagne débute en juin 1429. Les premiers assauts sont des victoires et les Français libèrent de nombreuses villes. Toutefois, les Anglais ne tardent pas à recevoir des renforts.

Le 17 juin, les deux armées se rencontrent à Pratoy. Les Français profitent du désordre dans les rangs ennemis pour remporter la victoire. Ce n'est qu'à la fin du mois que l'armée française se met en route pour Reims. Celle ci entre en Bourgogne, passe Auxerre et arrive à Troyes. Le roi craint chaque arrivée dans une ville, puisque le Duc de Bourgogne est un ennemi. A chaque fois, il envoie des lettres de soumission et Jeanne assure aux habitants le pardon de Dieu. Face à cette attitude, les villes ouvrent leurs portes.

L'armée est très bien accueillie à Reims le 16 juillet. Le sacre se déroule le lendemain. Les regalia sont réunies en toute urgence. Jeanne est présente lors de la cérémonie. Sa mission est accomplie. Une fois roi, Charles VII mène des négociations avec Philippe de Bourgogne et conclut une paix. Maintenant, il faut reconquérir la capitale. Le roi parcourt la Picardie. Pendant ce temps, des renforts anglais débarquent à Calais et se dirigent vers Paris. Les deux armées se font face à Senlis au mois d'août. Le 8 septembre 1429, Jeanne impatiente tente un premier assaut sur Paris. C'est un échec cuisant. Le roi apprenant la nouvelle, ordonne la retraite et retourne à Bourges.


De Saint Pierre le Moutier à Compiègne
Charles VII préfère négocier plutôt que se battre. L'ardeur de Jeanne lui fait peur. Pour l'occuper, il lui confie quelques opérations militaires sans importance. En novembre 1429, elle accompagne le Sire d'Albret et le maréchal de Broussac. Le but est d'anéantir l'armée de Perrinet-Gressalt, un mercenaire au service du Duc de Bourgogne. Le premier assaut est donné à Saint Pierre le Moutier et réussit de justesse. Ensuite, il est décidé d'attaquer sa résidence principale, c'est à dire La Charité sur Loire. L'armée installe le siège, mais doit se retirer à cause du froid. A Noël, le roi anoblit Jeanne, ainsi que ses parents et ses frères.

Le Duc de Bourgogne peu enclin à respecter la paix, rassemble ses troupes, afin de conquérir les villes de l'Oise et de Seine et Marne. Une vague de résistance éclate à Compiègne, Saint Denis et Melun. Jeanne trépigne d'impatience et rêve de partir au combat. Le roi quant à lui ne bouge pas.

Un beau jour, Jeanne décide de quitter Bourges avec deux cents hommes sans prévenir le roi et se rend à Compiègne. Elle traverse la Seine et Marne. A Melun. elle reçoit une autre révélation dans laquelle sa fin est annoncée pour la Saint Jean (24 juin). Le 23 mai, elle lance l'assaut sur Compiègne. L'attaque échoue de peu et Jeanne est faite prisonnière.

Le Duc de Bourgogne utilise la capture de Jeanne comme propagande. Elle est transférée le 26 mai au château de Beaulieu les Fontaines près de Nogon. Elle tente de s'échapper, mais sans succès. Le 15 juin, elle est de nouveau transférée au château de Beaurevoir soixante kilomètres plus loin. Elle tente une nouvelle évasion, mais toujours sans succès. Le Duc de Bourgogne reçoit 10.000 livres de la part des Anglais pour qu'il livre sa prisonnière. L'échange a lieu à Arras au mois d'octobre. Pierre Sureau le receveur général de Normandie et évêque de Beauvais, organise le procès de Jeanne avec les universitaires parisiens. Ces derniers sont depuis longtemps convaincus de l'hérésie de Jeanne. Elle arrive à Rouen le 24 décembre.


Rouen
Le procès de Jeanne est politique. Si les Anglais réussissent à prouver qu'elle est hérétique, ils pourront contester la légitimité de Charles VII. Les deux juges principaux sont l'inquisiteur et l'évêque de Rouen. Ils sont accompagnés des assesseurs, qui n'ont qu'une voie consultative. Le procès débute le 9 janvier 1431.

Il commence par le procès d'office avec enquête et interrogatoire et concerne la vie de Jeanne. Les témoignages lui sont plutôt favorables. S'ensuit le procès ordinaire, où l'on tente d'amener le coupable à la pénitence. Le procès comporte plusieurs vices de procédure. Tout d'abord, Jeanne n'a pas eu le droit à un avocat. Ensuite, elle fut considérée comme une prisonnière ecclésiastique, mais elle n'eut pas le droit à la garde à vue de ce type, moins pénible que la garde à vue de type prisonnier de guerre. Malgré tout cela, Jeanne arrive à répondre aux questions et aux accusations avec beaucoup d'intelligence. Ses réponses semblent anéantir les accusations et surtout les contradictions destinées à la confondre.

Le procès s'éternise. Au mois de mars, seul le délit d'habit est clairement reconnu. Les autres délits restent dans le domaine de l'accusation. En avril, Jeanne tombe malade. Narwich, gouverneur de Rouen ne veut pas qu'elle s'en sorte sans condamnation sérieuse et fait pression sur les juges. Le 24 mai, Jeanne est convoquée. Elle est condamnée pour hérésie. Par une sombre machination, on lui fait signer des aveux. Le mercredi 30 mai 1431, elle est mise au bûcher sur la place du marché de Rouen.

Le 15 février 1450, Charles VII entre dans Rouen qu'il vient de libérer. Il ordonne une enquête, afin de savoir si le procès a été conduit selon la loi. Après enquête, le roi la déclare innocente. Le 28 janvier 1456, il réhabilite sa mémoire et dédommage ses parents.



"De l'amour ou haine qu'à Dieu pour les Anglais, je n'en sais rien. Mais je sais bien qu'ils seront tous boutés hors de France, excepté ceux qui y périront."
Jeanne d'Arc


Sources :
Texte : PERNOUD. Régine : Jeanne la Pucelle
Image : linternaute.com

lundi 29 novembre 2010

Les Hébreux


D’Abraham à Moïse
Abraham, Sara sa femme, son fils et son neveu quittent Ur pour s’établir au pays de Canaan vers -1800. Ismail et Esaü fonderont chacun une nation : les Arabes et les Edomites. Les Hébreux descendant d’Abraham, se disent fils d’Israël, nom reçu par Jacob, petit fils d’Abraham, lors de sa lutte avec l’ange au gué de Yabboq.

Les descendants de Jacob s’installent en Egypte, où ils finissent par être asservis et employés dans les ambitieuses constructions des pharaons de la XVIIIe dynastie. La tradition évalue le nombre d’Hébreux à quitter l’Egypte sous la direction de Moise durant l’Exode, entre 600 et 800. En réalité, compte tenu des conditions logistiques, ce chiffre doit être revu à la baisse. Moise est un chef énergique sachant combiner indulgence et sévérité face à un groupe indocile, dont il réussit peu à peu à faire un peuple. Il lui impose un ensemble de loi et la croyance en un seul dieu unique. Selon certains historiens, Moise aurait été un aristocrate égyptien, ayant transmis aux Hébreux un monothéisme issu de la réforme d’Akhenaton vers -1370.

On appelle en hébreux Tora, un ensemble de cinq livres, d’où son nom grec Pentateuque, qui place en tête un corpus plus vaste qu’est l’Ancien Testament. Cet ensemble réunit un certain nombre de règles morales, sociales et culturelles, destinées à gouverner la vie des adeptes de la croyance monothéiste rattaché à Moise.


Au temps des juges et des rois
Moise meurt avant d’avoir regagné la terre promise. Il désigne comme successeur Josué. La conquête de Canaan paraît plus vraisemblablement résulter d’une pénétration lente, plutôt que d’une brillante campagne militaire, comme veut le montrer le siège de Jéricho. Selon la Bible, Josué répartit les territoires entre les douze tribus d’Israël. Chaque tribu se dote d’un juge, chargé de gouverner et de mener les opérations militaires. Le plus célèbre est Samson, doué d’une force exceptionnelle. Il défit les Philistins et n’est capturé que grâce à une ruse féminine.

Face aux menaces extérieures, les Hébreux éprouvent le besoin d’un pouvoir central stable en la personne d’un roi. Dans la Bible, Samuel est le porte-parole des Hébreux face à Dieu. C’est lui qui formule cette demande. Un jeune homme de la tribu de Benjamin se distingue par sa taille et sa force. Il s’agit de Saül, qui reçoit de Samuel l’onction royale. La guerre contre les Philistins perdure.

Les armées ennemies sont dirigées par Goliath, qui est tué dans une bataille par David, un berger servant dans les troupes. Il entre à la cour et se lie d’amitié avec le prince Jonathan, qui apprécie ses dons pour la musique. Il épouse la princesse Mikhaïl. Saül, jaloux du succès de David tente de l’assassiner. David s’exile. A la bataille de Jezréel, Saül et son fils trouvent la mort. David soutenu par le peuple, lui succède. Il choisit une capitale en terrain neutre, Jérusalem. Après avoir conquis la ville vers -1004 et construit son palais, David repart en campagne contre les Philistins. Il les soumet, ainsi que les Moabites et les Araméens. Vers la fin de son règne, David est chassé par son fils Absalon, mais l’ancien roi reconquiert son trône.

En -968, le règne de Salomon débute. La paix extérieure étant acquise, le roi juste réorganise le pays. Il le divise en district et met en place une administration. Il épouse la fille de Pharaon. Salomon fait de sa capitale le centre religieux unique en bâtissant le Temple. Construit en 37 ans, mesurant 30 mètres de long sur 15 de large et de autant de haut, son décor est extrêmement raffiné. L’arche d’alliance contenant les Dix Commandements, y est entreposée. Salomon ne résiste pas aux femmes étrangères. Il épouse la reine de Saba. Il meurt en -928.

A sa mort, le royaume d’Israël se divise. Les dix tribus du Nord forment le royaume d’Israël avec pour capitale Tirsa, puis Sömeul. Les deux tribus du Sud avec comme capitale Jérusalem, restent fidèle à la dynastie et forment le royaume de Juda. Roboam succède à son père, tandis que le Nord élit Jéroboam, un égyptien qui réinstaure le polythéisme. Déchiré par la conspiration et les assassinats politiques, le royaume d’Israël devient une proie facile pour les envahisseurs.

Le roi Omri (-884/-824) transfère la capitale sur la montagne de Samarie et la fortifie. Le roi assyrien, Iglath Phalassar III conquiert la Galilée. Ensuite, Sargon déporte une partie de la population et fait le siège de Samarie en -721. Vainqueur, il favorise l’implantation de colons. Le royaume de Juda connaît aussi de nombreux mouvements de cour. Le roi Ezéchias doit également faire face aux Assyriens. Le roi Josias renouvelle l’alliance avec Dieu, fait brûler les idoles, démolit les temples païens. Il meurt à la bataille de Megiddo contre le pharaon Néchao. Ce dernier place sur le trône son frère et exige un lourd tribut. Nabuchodonosor II le renverse et asservit le pays. Il installe son oncle. Ensuite, le roi entreprend le siège de Jérusalem, qui finit par céder à cause de la famine. En -597, la Judée n’est plus qu’une province babylonienne.


De la période perse à la révolte des Maccabées
En -539, Cyrus roi de Perse conquiert Babylone. Il signe à Ecbatane un édit autorisant le retour des Judéens exilés et la reconstruction du Temple. Le retour vers la terre promise s’étale sur plusieurs décennies. La reconstruction s’accompagne d’une restauration religieuse, conduite par deux personnes : Ezra et Nekem. Leur souci est d’éradiquer les influences étrangères pouvant conduire à de nouvelles idolâtries, ainsi que la connaissance de la Tora.

La Judée fait partie de la Transeuphratine, dirigée par un stratège. La plupart d’entre eux, sont des Judéens, même s’ils ont parfois des noms babyloniens. Les exilés ont su préserver leur culture hébraïque, mais ils connaissent aussi l’araméen ramené de Babylone. Au IVe siècle av. J.C, la Judée passe sous le contrôle de l’Egypte. Après la mort d’Alexandre, la Judée est l’objet de disputes entre les Séleucides et les Ptolémées Lagides. Il existe une importante communauté juive à Alexandrie. Selon Aristote, c’est vers -280 que la Tora aurait été traduite en grec. Puis c’est l’ensemble de la Bible connu sous le nom de Septante. En -198, Antiochos III annexe la Syrie et la Judée.

L’usurpation du sacerdoce par des intrigants, la vénalité de la charge de grand prêtre jusque là héréditaire, l’hellénisation des mœurs, irritent une grande partie de la population. Des troubles éclatent entre les partisans de Jason et de Ménélas. Antiochos III ne veut pas d’une révolte à Jérusalem. Il renforce la brutalité des répressions et l’hellénisation de la société. Le mouvement de résistance est repris par Modin et ses fils, de la famille des Maccabées. Son fils Juda bat plusieurs fois les Séleucides, s’empare du Temple et le purifie. Juda meurt au combat en -161. Son frère Jonathan reprend la lutte. Il étend son territoire avant d’être assassiné.

A cette époque, les juifs se divisent en plusieurs courants. Les sadducéens très conservateur, les pharisiens proche du peuple et développant une tradition orale et esséniens vivant en communauté à l’écart du monde.


De la dynastie hasmonéenne au règne d’Hérode
Simon, le frère de Juda peut être considéré comme le fondateur de la dynastie hasmonéenne. La Judée retrouve son indépendance. En -134, Jean son fils lui succède et doit une nouvelle fois lutter contre les Séleucides. Son frère, Alexandre lui succède, reprend les conquêtes et étend son territoire. Le royaume s’étend de la Phénicie au Nord de l’Egypte. Les pharisiens sont de farouches adversaires politiques, qui contestent la légitimité de la dynastie. En -80, huit cents d’entre eux sont crucifiés. A la mort d’Alexandre, la reine décide de s’appuyer sur ce parti. Elle meurt en -67.

Ses deux fils, Hyrcan et Antipater se livrent une lutte de pouvoir. Hyrcan demande l’aide de Pompée, qui assiège Jérusalem. Le royaume de Judée devient un Etat client et est soumis à un lourd tribut. Hyrcan garde sa fonction de grand prêtre et l’autorité sur le royaume. En -47, l’un des quatre fils d’Antipater prénommé Hérode, est nommé stratège de Galilée. Celui ci s’allie avec Marc Antoine et devient roi en -31 avec l’appui du Sénat romain. Il épouse la petite fille d’Hyrcan et fait éliminer ses rivaux. Octave devenu Auguste le conforte dans sa position, afin de garder un allié aux portes de l’Empire. Hérode développe le commerce par ses ports, construit de nombreuses infrastructure et forteresses dans tout son royaume. Il reconstruit le Temple.


De la domination romaine à la révolte juive
En 6, Auguste dépose le fils d’Hérode sur demande de la population. La Judée est désormais une simple province romaine. Néanmoins, les Judéens ne supportent pas de payer le tribut à Rome. En 37, les Juifs se révoltent et nomment un roi en la personne d’Agrippa Ier, petit fils d’Hérode, très proche de Claude et de Caligula. Il meurt en 44.

Claude jugeant ses fils trop jeunes pour régner, il envoie des procurateurs pour administrer le pays. Les émeutes et les violences reprennent. L’arrivée d’Agrippa II sur le trône, ne change rien, car il est trop soumis à Néron. En 66, une armée rebelle juive chasse les Romains de Jérusalem et le procurateur Félix. Néron envoie le général Vespasien pour reprendre le contrôle de la région. Celui ci s’enfonce rapidement dans le pays, remportant de nombreuses victoires. Il fait route vers Jérusalem, où des factions politiques se battent entre elles. Le siège est confié à Titus, car Vespasien devenu empereur, rentre à Rome. Durant le siège, un incendie détruit le Temple et sur ordre de Titus, la ville est complètement pillée.


Défaites politiques et reconstruction spirituelle
Les théologiens juifs recherchent les causes de la défaite dans une explication divine. Rabban Yohanan Ben Zakkaï contribue grandement à la restauration du Judaïsme. Il développe de nombreuses écoles religieuses.

En 132, une nouvelle révolte éclate contre Rome, mais elle réprimée. Furieux, Hadrien renomme la province de Judée, Palestine. Au IIIe siècle, les échecs successifs des révoltes juives apparaissent comme des preuves de l’abandon divin et conforte l’idée que le Christianisme est devenue la vraie religion. Cependant, contrairement aux chrétiens, les juifs ont une religion légale dans l’Empire, ce qui leur permet de se diffuser. Hélène, la mère de Constantin désire faire de Jérusalem, une ville chrétienne. Après l’Edit de Constantin, le Christianisme devient la religion officielle de l’Empire. Les juifs sont chassés de Jérusalem. Le Saint Sépulcre est construit. Les Juifs ne peuvent venir en pèlerinage qu’un jour par an, près du Mur des Lamentations.

Après la chute de Rome, la Judée reste sous le contrôle de Byzance. Le statut des juifs promulgué par Justinien au VIe siècle, ne changera plus jusqu’au XVe. Quels que soient leur origine et leurs lieux de résidence, les Juifs se considèrent comme un seul peuple, ayant une langue, une terre promise, une ville sainte et une mission divine en attendant le retour du Messie rédempteur.


" Celui qui se tait le premier dans les disputes est le plus digne de louange."
Proverbe hébreux


SOURCE
Texte : HADAS-EBEL. Mireille : Les Hébreux entre la Bible et l'histoire
Image : interhg.free.fr