jeudi 18 novembre 2010

L'Inde des Gupta

L’Inde avant les Gupta
Dès -7000, le Nord-ouest du sous continent indien a été le théâtre de la révolution néolithique. Vers -2500, de grandes cités émergent sur les bords du Gange, qui commercent avec les cités de Mésopotamie. Vers -2000, les Aryens peuple originaire de la Mer Caspienne s’installent dans la péninsule. Ils mettent en place un système social très hiérarchisé, ancêtre des castes actuelles. Ils parlent le sanskrit, cette langue appelée à devenir le vecteur par excellence de toute forme élevée de la culture dans le monde indien. Ils ont comme religion le védisme se basant sur les forces de la nature. Le védisme se développe progressivement pour s’enrichir de concept abstrait et devient l’hindouisme.

En réaction à la domination sociale des brahmanes (prêtre) d’autres courants de pensée voient le jour au Ve siècle av JC. Il s’agit du jaïnisme prônant un mode de vie ascétique et pacifique, puis du bouddhisme dont le salut consiste à se libérer du cycle infernal de la réincarnation. La domination perse, puis la conquête d’Alexandre ont joué un rôle considérable dans l’apparition d’une conscience politique au sein des différents royaumes gangétiques. Le plus important le Magadha devient le berceau de l’Empire Maurya en -320.

En -305, un traité signé entre Séleucos un général de l’armée d’Alexandre et Chandragupta, donne à ce dernier les régions à l’Est de l’Indus en échange d’un tribut de 500 éléphants. Ashoka son fils lui succède. Il hérite d’un Etat centralisé, prospère, doté d’une puissante armée. Après avoir maté de nombreuses révoltes avec violence, il se convertit au bouddhisme et cherche à garantir le lien entre spirituel et matériel de son peuple.

Les successeurs se révèlent incapables de maintenir la cohésion de l’empire. En -176, Pushgamitra assassine le souverain et fonde la dynastie des Shunga, régnant davantage sur une fédération que sur un empire centralisé. En -64, ils sont remplacés par les Kanva.


Des Kushana aux Gupta
Au milieu du IIe siècle av JC, les Scythes commencent à descendre des confins d’Iran vers la vallée de l’Indus. Au siècle suivant, le roi Mauès d’origine scythe règne sur un grand domaine. Ils sont renversés peu à peu par le peuple des Yuezhi originaire de Chine. Pendant les premiers siècles de l’ère chrétienne, la situation politique du Deccan et du Sud de la péninsule de l’Inde est particulièrement complexe.

Les origines de la dynastie Gupta sont mal connues. La dynastie apparaît avec Chandragupta Ier (320-335). Ses descendants étendent leur influence par le biais de mariages et de conquêtes militaires, notamment son petit fils Sanudragupta. Son fils Chandragupta II après avoir éliminé son frère, met un terme définitif aux Scythes d’Inde. Sous sa tutelle, le domaine Gupta atteint sa plus grande extension réunissant le Pakistan, le Bangladesh, plus le Nord de l’Inde ainsi que la côte Est.

L’ordre de succession des monarques ultérieurs n’est pas connu avec précision. Plusieurs souverains ont d’ailleurs pu régner ensemble sur un empire à la veille de s’effondrer et qui se fissure autant de l’extérieur que de l’intérieur. Miné par l’émergence de nouvelles dynasties au sein même de ses territoires affaibli par les attaques répétées des Huns et déstabilisé par des troubles internes. L’empire vacille et s’effondre au début du VIe siècle, sous le règne de Bhânugupta. Les destinées de l’Inde passent alors entre d’autres mains, telle la dynastie des Maushari ou des Huns convertis à l’Hindouisme.


Une politique de tolérance religieuse
Les empereurs Gupta sont de fidèles et constants dévots du dieu Vishnu. Les sceaux royaux et les monnaies témoignent de cette obédience. L’époque Gupta voit la rédaction, la compilation ou le remodelage des principaux récits antiques, dont beaucoup exaltent la gloire de Vishnu. Si l’essor du Shivaïsme fut moindre à l’époque Gupta, il fut loin cependant d’être insignifiant, tout comme l’attestent les divers temples élevés. Certains feudataires des Gupta sont d’obédience shivaïte. C’est également à cette époque que certains Purana shivaïtes sont rédigés. Le culte de Shiva est très florissant dans la ville de Mathura.

Le culte dévoué à son fils Kumara le chef des armées divines, est aussi important comme le montre la numismatique royale. S’il n’eut jamais à souffrir de l’hostilité déclarée de la dynastie régnante, le bouddhisme ne bénéficie pas non plus de son patronat. Seuls trois empereurs sont associés à la fondation de monastères bouddhiques. Le bouddhisme a pâti de l’essor de l’hindouisme, qui est mieux structuré et plus organisé. Pour les prêtres hindous, les bouddhistes sont perçus comme de dangereux hérétiques, dont les croyances constituent une menace pour la société. Pourtant en dépit d’un contexte trouble, le bouddhisme se développe de façon notable et quelqu’un de ses plus grands érudits tels Aranga, y produisent leurs travaux les plus célèbres. C’est aussi à cette époque que les monastères bouddhistes commencent à se transformer en grands centres d’éducation religieuse, comme celui de Sarnath.


Belles lettres et culture savante
L’époque Gupta est marquée par le rayonnement de la langue et de la littérature sanskrite. Elle est considérée comme la langue des dieux transmise aux hommes par une révélation et tenue pour être à l’origine de toutes les langues du monde. Les Gupta lui vouent une véritable admiration, à tel point qu’ils en préconisent l’usage et la pratique jusque dans l’intimité des gynécées royaux.

D’immenses talents scientifiques purent s’épanouir à cette époque, au premier rang desquels figure le mathématicien Aryabhata, âgé de 23 ans lorsqu’il rédige son traité. Il détermine la valeur de pi et développe la théorie des ellipses pour observer le mouvement des planètes. En médecine, Vagbhata compile toutes les connaissances dans ce domaine. L’ouvrage est traduit en tibétain et en perse. Les sciences vétérinaires sont également abordées, notamment pour les chevaux et les éléphants. La médecine est enseignée dans les grandes institutions bouddhiques. Certaines villes comptent de nombreux hôpitaux.

L’époque Gupta voit surtout l’épanouissement des belles lettres et de la littérature profane et le seul nom du poète et dramaturge Kalidasa suffit à incarner l’âme et le génie de cet âge d’or, où la culture de cour marie raffinement, élégance et beauté. Il est l’auteur de drames et de pièces de théâtre, dont la plus célèbre est Sakuntala traduit en anglais en 1789.


L’art de l’Inde classique
Une grande originalité apparaît dans les monnaies. Les Gupta ont su faire inscrire leurs aspirations politiques et religieuses. La statuaire a livré des témoignages à travers lesquels de nouvelles tendances semblent se dessiner. L’architecture en revanche s’est développée de manière plus tardive. Peu d’œuvre peuvent être reliées directement au mécénat de l’un ou l’autre des souverains Gupta. Certes leurs noms apparaissent dans diverses inscriptions dédicatoires, mais la commande n’émane pas d’eux.

C’est dans le domaine de l’architecture et de la sculpture religieuse que l’époque Gupta se révèle novatrice. Pour la deuxième fois, des monuments dans lesquels se fait jour une vraie science de la construction sont édifiés en matériaux pérennes. Le plan, l’élévation et le décor de ces édifices se révèlent variés et riches de symboles. L’architecture religieuse se veut la transcription de la volonté divine dans le monde des hommes. D’une extrême diversité, la statuaire de l’époque Gupta donne à voir les plus beaux chefs d’œuvre de tout l’art indien. L’ampleur du domaine des Gupta explique le caractère unitaire de la statuaire aux Ve et VIe siècle, ainsi que le fort régionalisme qui la marque en même temps. A la même époque, l’iconographie se fixe de manière canonique. Deux grandes écoles d’art se distinguent, celle de Mathura et celle de Sarnath. La première a laissé un nombre considérable d’images hindoues et bouddhiques, la seconde est célèbre pour ses statues de bouddha.


Le rayonnement du classicisme indien
Les relations entre l’empire Gupta et le royaume du Népal doivent être étroites vu le nombre d’œuvres népalaises parvenues jusqu’à nous. Dès le Xe siècle, à la faveur des liens tissés entre les universités du Nord-est de l’Inde et le nombre de pays bouddhistes, l’héritage Gupta contribue à modeler de manière significative l’art des pays himalayens ou celui de certains pays d’Asie du Sud-est. La route de la soie a permis le développement du bouddhisme et de cet art en Chine et en Afghanistan.


"Notre corps est la barque qui nous portera jusqu'à l'autre rive de l'océan de la vie. Il faut en prendre soin."
Swami Vivekanananda


Source :
Texte : OKADA. Amina : L'âge d'or de l'Inde classique
Image : http://www.buddhachannel.tv/portail/IMG/bmp/Sculpture_gupta.bmp

mardi 16 novembre 2010

Les Guerres d'Italie

Le voyage de Naples
La paix de Lodi en 1434 a stabilisé quelque peu la situation politique et militaire de l’Italie. Dès 1492, des tensions apparaissent entre Ludovic Sforza le duc de Milan et Alphonse II le roi de Naples d’origine espagnole. Ce différent est dû au rapprochement d’Alphonse II avec Pierre de Médicis, prince de Florence. Cherchant de nouveaux alliés, Sforza rend visite au roi de France Charles VIII et lui demande son aide. Charles VIII est intéressé par les terres de Naples dont il se dit l’héritier légitime, car la famille d’Anjou a été chassée par les Aragonais. Charles VIII pénètre en Italie au mois de septembre 1492. En six mois, il traverse tout le pays et bat tous ses adversaires en s’appuyant sur son artillerie.

Les Italiens sont surpris et terrorisés par la façon dont les Français combattent. En effet, ceux qui osent résister sont massacrés. Pierre de Médicis sentant le vent tourner, se place sous protectorat français. Pise en profite pour se révolter et les Florentins chassent leur prince, considéré comme un tyran. Les nobles privés de pouvoirs, souhaitent établir une oligarchie, mais un dominicain nommé Savonarole soutenu par le peuple parvient à installer une sorte de démocratie. Il prêche la réforme de l’Eglise. Pour lui, les Français sont venus punir les Florentins de leurs pêchés. Un grand conseil regroupant 3000 citoyens, est instauré. Cette institution durera jusqu’en 1530.

La descente de Charles VIII inquiète les dirigeants italiens. Ils voient d’un très mauvais œil l’invasion française. Le 31 mars 1495, Venise, Milan, le Pape Alexandre VI, l’Espagne et l’Empire forment une ligue anti-française. Immédiatement, Charles VIII ordonne la retraite de ses troupes. Le 20 mai, l’armée française quitte Naples. Le roi laisse Gilbert de Montpensier comme gouverneur. La retraite française est difficile. Le 27 mai, ils arrivent près du village de Fornoue dans les Alpes. Là les attend l’armée de Gonzague duc de Mantoue et général des armées de la Ligue. La bataille s’engage. L’armée française aurait été écrasée, si la cavalerie vénitienne était venue soutenir l’infanterie au lieu de piller les bagages de leurs ennemis. Ainsi, Charles VIII force le passage, traverse le Taro et reprend sa route. Il ne perdra que 200 hommes. Charles VIII regagne la France, le 15 juillet. Entre temps, Ferdinand roi d’Espagne, a repris Naples. Charles VIII n’a plus le choix. Il signe la paix de Verceil avec Milan. Le roi a hâte de retourner en Italie, mais sa mort le 7 avril 1498, l’en empêche. Il s’est cogné la tête contre une poutre.


Les rapaces dans les entrailles de l’Italie
C’est Louis d’Orléans qui succède à son cousin sous le nom de Louis XII. A son tour, il revendique le royaume de Naples et le duché de Milan, de par sa grand-mère Valentina Visconti. Appuyé par les Vénitiens, il pénètre en Italie. Il prend Milan sans difficulté. Ludovic le More le duc, se réfugie à Vienne. Il laisse comme gouverneur Trimulzo, un milanais favorable à la France. Dès 1500, Ludovic Sforza reprend sa ville. Les Français réagissent sans attendre. Sforza est arrêté et emprisonné à Loches où il mourra en 1508.

Le pape Alexandre VI a accordé le divorce à Louis XII, afin qu’il puisse épouser Anne de Bretagne. En échange, la France doit conquérir la Romagne pour le compte du fils du Pape, César Borgia. Louis XII tient sa parole et lui envoie des troupes. En deux ans, il conquiert toutes les terres, ayant échappée à l’Eglise. Le 18 août 1503, Alexandre VI meurt. Il est remplacé par Pie III dont le pontificat ne dure que quelques mois. Jules II le remplace. C’est un adversaire des Borgia et César est arrêté. Obligé de rendre ses terres au Pape, il rejoint l’Espagne. Comprenant qu’il n’est pas en sécurité, il se rend à la cour de Navarre. Il meurt au combat contre les Espagnols, le 12 mars 1507.

En 1500, Louis XII s’allie avec Ferdinand en vue de partager le royaume de Naples. L’armée de Ferdinand d’Aragon est écrasée et le royaume occupé. Très vite, Français et Espagnols s’entredéchirent pour la possession des Pouilles, une région riche grâce à la laine. Les Espagnols remportent la bataille de Gaète, le 1er janvier 1504, où s’illustre le chevalier Bayard. Les Espagnols occupent Naples, tandis que les Français demeurent à Milan. La politique de Louis XII a à la fois renforcé la puissance temporelle de la Papauté et permis aux Espagnols de s’établir durablement en Italie.


La fureur des barbares
En 1503, Jules II est élu Pape. Il a à cœur de renforcer sa puissance sur l’Italie et Venise constitue un obstacle. En effet, la Sérénissime a profité de la chute de César Borgia pour s’accaparer des terres. En 1508, il forme la ligue de Cambrai avec la France et l’Empereur Maximilien. La guerre est déclarée. Les Vénitiens subissent de lourdes pertes face aux armées françaises. En deux semaines, Louis XII, Jules II et Maximilien Ier récupèrent les territoires que la ligue leur concédait. Cependant, Venise soutenu par son peuple continue de résister et son armée occupe Padoue. Jules II décide soudainement de s’allier à Venise, conscient des dangers d’une trop grande domination française. Dès lors, Venise ne joue plus de rôle militaire, se bornant à un rôle de médiateur, faisant d’elle la cité de la paix. A partir de 1510, la France devient l’ennemi.

Jules II mène en personne les combats. Louis XII exhorte les cardinaux à réunir un concile à Pise. L’empereur le soutient. Toutefois, il ne sera pas écouté. Le Pape signe un traité avec le Roi d’Espagne. C’est Don Ramon, qui prend le commandement des troupes de la Sainte Ligue. Par ailleurs, il convoque un concile à Rome, coupant l’initiative à Louis XII.

Les troupes espagnoles entre en campagne fin janvier 1512. Les Français les repoussent à Bologne. Gaston de Foix, le général français, veut profiter de la situation. Il force ses ennemis à se retirer à Ravenne. Après d’âpres combats, Gaston de Foix est tué et son armé prend la fuite. La Sainte Ligue reçoit l’appui des Suisses. Les Français sont chassés d’Italie. Le Milanais revient Massimiliano Sforza. Les Médicis récupèrent Florence, Jules II les états de César Borgia. Ce dernier meurt le 20 février 1513.


Un conflit européen
Louis XII de retour en Italie peu de temps après, reprend Milan, mais il recule devant les Suisses, supérieurs en nombre et en technique à la bataille de Novare. Louis XII doit une nouvelle fois abandonné l’Italie, car il doit faire face à une invasion au Nord des Anglais, secondés par les Suisses. Néanmoins, les Anglais perdent du temps et regagnent leur pays avant l’hiver. L’Italie s’avère être le champ de bataille privilégié d’un conflit qui la dépasse, puisque l’enjeu en est la suprématie d’une des grandes monarchies nationales sur le continent.

Les Suisses se sentant invincibles, entendent jouer un rôle politique sur la scène internationale. Ils réclament la Bourgogne et le Milanais. Sforza cède, mais les Suisses ne parviennent pas à mettre en place une politique de long terme, se contentant d’exploiter les richesses. Si leur cohésion et leur discipline au combat sont sans égales, leurs institutions politiques et diplomatiques ne sont pas à la hauteur de leur force militaire.

Louis XII fait la paix avec le Roi d’Angleterre. Il s’apprêtait à repartir pour l’Italie, quand il meurt en 1515. C’est son gendre François Ier, qui lui succède. A peine couronné, il rassemble ses troupes, signe des traités avec l’Espagne, l’Angleterre, l’Empereur, et part pour l’Italie. Allié aux Vénitiens, il retrouve l’armée suisse et les troupes de Léon X, le nouveau Pape. Les deux armées s’affrontent à Marignan, le 13 septembre. La bataille est rude et les pertes sont terribles des deux côtés, mais ce sont les Suisses qui reculent.

François Ier conquiert alors toute la Lombardie. Il signe avec les Suisses la paix de Fribourg, le 11 novembre 1516, dite « paix perpétuelle » faisant ainsi des Suisses les alliés de la France jusqu’en 1789. Léon X le rejoint à Bologne. Ensemble, ils signent un concordat réglementant les liens entre la monarchie française et la Papauté. Le Roi accroît son contrôle sur les nominations du haut clergé et se voit conférer un droit de regard sur une partie des impôts levés au nom de l’Eglise. En échange, François Ier renonce au Royaume de Naples.

La guerre entre la France et l’Espagne reprend dans le Nord, en Picardie et dans les Flandres. Cependant dès 1520, les deux armées s’affrontent de nouveau en Italie. En 1522, les Français sont battus. Le Milanais revient à Francesco Sforza. L’année suivante, la trahison du Connétable Charles de Bourbon fait basculer la balance en faveur de Charles Quint. Les Français quittent le pays. Durant leur retraite, Bayard trouve la mort le 30 avril 1524.

L’armée espagnole envahit la France par la Provence et assiège Marseille. François Ier parvient à les repousser au delà des Alpes. Il reprend Milan et entame le siège de Pavie. Le siège dure trois mois. Des renforts pour Charles V, venus d’Allemagne arrivent et encerclent les Français.


Le dénouement
A Pavie, l’armée française est massacrée et François Ier est fait prisonnier. Plus rien ne s’oppose à l’hégémonie espagnole sur l’Italie. Le nouveau Pape Clément VII souhaite garder un équilibre des forces. Il contracte des alliances avec Venise, Florence, Milan et l’Angleterre formant la Ligue de Cognac. Auparavant, François Ier renonce à tous ses droits en Italie, à la Bourgogne et cède des places fortes en Picardie. En échange de sa liberté, il est contraint de verser une rançon et de livrer ses deux fils en otages.

Le duc d’Urbino, Francesco Maria della Roviere refuse d’attaquer Milan ou de risquer une bataille rangée contre l’Espagne. Il préfère attendre les renforts de Suisse et de France, qui tardent à arriver. Par ailleurs, le Pape se demande s’il ne vaut mieux pas se réconcilier avec Charles Quint, afin d’enrayer la progression des Turcs en Europe Centrale. Profitant de ces hésitations, les Espagnols assiègent Rome.

Le 6 mai 1527, le Connétable de Bourbon lance l’assaut. Il est tué au combat, mais les armées prennent la ville. La soldatesque livrée à elle même, n’hésite pas à mettre la ville à feu et à sang. Les églises sont pillées, le Pape fait prisonnier est enfermé au château de Saint Ange. En février 1528, les soldats quittent la ville pour se rendre à Naples.

Si le retentissement du sac de la ville éternelle est considérable dans tout le monde chrétien, celui ci n’a rien réglé sur le plan militaire. L’armée française arrive en Lombardie et part sans attendre pour Naples assiégeant la ville au mois d’avril. Le siège tourne au désastre à cause des maladies et de la trahison de l’amiral Andrea Doria commandant de la flotte française.

A Florence, le peuple se soulève et chasse les Médicis. Clément VII ne voit pas d’un très bon œil cette rébellion. Il se rend à Barcelone et demande l’aide de Charles Quint en échange de la couronne impériale. De son côté, la France signe la paix avec l’Espagne par le traité de Cambrai appelé la paix des dames, car elle a été négociée par la Reine Mère et la tante de Charles Quint Marguerite d’Habsbourg. Par ce traité, les Français sont chassés d’Italie. Les troupes impériales entament le siège de Florence. Les habitants résistent vaillamment, mais finissent par capituler le 9 août 1530. Clément VII redonne le pouvoir à Alexandre Médicis et le fait duc.


L’invention de la nouvelle Europe
En 1530, toute l’Italie est sous domination espagnole. Charles Quint est couronné empereur par Clément VII, devenant ainsi le souverain le plus puissant d’Europe. Le 1er novembre 1535, le duc de Milan meurt sans héritier. François Ier réclame le duché. L’armée française pénètre de nouveau en Italie conquiert la Savoie et le Piémont, mais doit rebrousser chemin.

Au fil des ans, les affaires italiennes constituent de moins en moins l’enjeu principal des rivalités. Sous Henri II, l’Italie est encore le théâtre de quelques escarmouches, mais les véritables combats ont lieu en Picardie. Le 3 mars 1559 suite à la défaite de Saint Quentin, Henri II signe le traité du Cateau-Cambrésis par lequel il renonce à toute prétention sur la péninsule et rend ses conquêtes. Cependant, s’il ne reste rien des conquêtes militaires, les jardins, les palais, les statues, les tableaux, les lettres de l’Italie ont favorisé l’éclosion d’une renaissance française, qui a suscité une réflexion inédite sur la langue et la littérature nationales et nourri les pensées de l’état moderne.


Sources :
texte : FOURNEL. Jean Louis, Les Guerres d'Italie.
image : csdm.qc.ca

lundi 15 novembre 2010

Gengis Khan

Le premier empire mongol
La Mongolie est occupée par des tribus nomades sur lesquelles ne s’exerce aucune domination réelle. Ces tribus sont formées de peuples de races différentes des Turcs (Naïmans, Ongüts, Kereïts, Tartares) et Mongole au sens strict du terme (Merkits, Oïrats, Tumats).

Selon la légende à la fin du XIe siècle, un chef nommé Qaidu aurait réussi à regrouper sous son autorité la plupart des clans mongolophones. Son petit fils Qabul Khan est assez puissant pour nouer des relations diplomatiques et militaires avec la Chine et avec les Tatares. C’est au cours d’une bataille contre l’armée chinoise entre 1155 et 1167, que Höelün, la femme de Yesügei neveu du souverain, donne naissance à un fils que l’on nomme Temudjin et qui va devenir Gengis Khan, le "chef suprême".


Temudjin
Yusügei est le chef de clan des Qiyat, qui fait partie des Bordjigin. Il s’est uni par fraternité avec le khan des Kereyit Toghrul. Pour sceller cette alliance, Temüdjin épouse à l’âge de neuf ans la fille de Toghrul, prénommée Börte. Plus tard, son père est assassiné.

Temudjin, sa mère, ses trois frères et sa sœur sont abandonnés par le clan et réduits à mener une vie errante et souvent misérable. Devenu adolescent, il se rend chez sa femme et se met au service de Toghrul, qui lui promet de lui rendre son patrimoine, ce qui fut chose faite. Il fallut encore lutter contre les Tartares, les Merkit et surtout les Naïman, dont le chef est Djamuqa est un ennemi de Toghrul.

En 1206, Temudjin a unifié la Mongolie et prend le nom de Gengis Khan, lors d’une assemblée plénière convoquée sur les rives de l’Onon. Cette accession au pouvoir est facilitée par l’appui du grand chaman Kökötchü, qui espère de la sorte prendre le pouvoir au travers de Gengis. Prévenue par sa mère, ce dernier fait exécuter le Grand chaman et le remplace par un autre entièrement dévoué à sa cause. Dès les premières années de son règne, il établit un code de lois, le yasak, récompense ses fidèles et organise l’armée.


Les conquêtes
Deux peuples importants en Mongolie se rallient dès 1206 à Gengis. Les Ongüt commencent par nouer des relations matrimoniales avec la famille du nouveau souverain. Les Ouïghours se font les éducateurs des Mongols et transmettent leur écriture, donnent un chancelier Tata Tonga et avec le sceau royal, les cadres d’une administration, qui permet à l’empire de se construire et de durer. Gengis demande à ses fils à apprendre à lire et à écrire.

Gengis étend sa domination de la Grande Muraille à Turfan et à Khotan. Tout cela se fait dans la paix et par diplomatie. Mais la guerre n’allait pas tarder à éclater. Les campagnes commencent par une expédition en Sibérie, dans le but d’assurer la tranquillité sur les frontières Nord. L’alliance avec les Ouïghours est peut être la cause de la guerre avec les Minyak, qui tiennent la partie orientale de la Route de la Soie, dont les Ouïghours contrôlent la partie médiane. Les conflits débutent en 1209 et dure 24 ans avec des trêves, mais sans paix véritable. Les Mongols traversent le désert de Gobi et mettent le siège devant la capitale et peuvent ainsi imposer leurs conditions : une déclaration de paix, la promesse d’une alliance appuyée par un tribut et un mariage avec des princesses du sang.

En mars 1211, Gengis convoque un conseil pour déclarer la guerre à la Chine des Kin. L’armée mongole ne parvient pas à franchir la Grande Muraille. Gengis s’empare de la Mandchourie et contourne l’édifice, mais ils sont battus par les Chinois et font demi-tour. L’année suivante, il reprend la guerre et cette fois entre dans Pékin. Il laisse le gouvernement du pays à l’un de ses meilleurs généraux Muqali et retourne en Mongolie. Muqali doit terminer la conquête de la Chine, qui sera réalisée en 1234.


La structuration de l'empire
Gengis Khan maintient une discipline stricte au sein de ses troupes, punissant toute infraction. Il développe un réseau de renseignements dans toute l’Asie, dont il sait tirer profit pour préparer et mener ses campagnes militaires. Sur le champ de bataille, il donne préférence à la victoire plutôt qu’à la bataille. Avant d’attaquer, il envoie toujours des ambassadeurs, pour demander à ses ennemis de se rendre. S’ils acceptent Gengis les laisse au pouvoir et devient leur suzerain en échange d’un tribut. Dans le cas contraire, Gengis ne montre aucune clémence.

Gengis adopte une politique de tolérance religieuse, qui réduit les tensions avec les prêtres locaux. Gengis Kahn est très proche d’un philosophe taoïste nommée Tchang-Tchouen, qui essaye de réduire les passions du souverain. En remerciement de ses conseils, il promulgue un édit le 11 avril 1223, exemptant d’impôt le maitre du taoïsme et les siens. Ce décret est la preuve de l’ouverture d’esprit des Mongols en matière de religion. D’autres édits du même genre pour d’autres religions verront le jour. Par ailleurs, il recrute souvent des étrangers, qui servent dans son armée et son administration. Il soutient les personnes méritantes et exécute les traites. Soucieux de s’ouvrir au monde, Gengis favorise le commerce avec l’Europe et la Chine et autorise le passage des marchands en garantissant la sécurité des routes.


La ruée vers l’Ouest
Un Naïman, Kütchlüg, ayant refusé de reconnaître la domination de Gengis sur son peuple, s’exile. Il prend le pouvoir à Almalik, dont le roi est un allié de Gengis. Ce dernier envoie son général Djebe pour secourir la ville. Djebe est reçu comme un libérateur et s’empare de la province de Kara Khitaï. Kütchlüng périt dans une embuscade lors de sa fuite. L’Empire mongol a désormais une frontière commune avec l’Iran.

En 1215, Gengis noue des relations diplomatiques avec le chah Muhammad. Trois ans plus tard, une caravane de marchands musulmans venant de Mongolie, est arrêtée sur la frontière iranienne et les marchands sont tous tués. Gengis envoie des ambassadeurs pour s’expliquer. Ceux-ci sont mis eux aussi à mort. C’est aux yeux de la loi mongole, un crime inexpiable. Gengis décide d'entrer en guerre.

Gengis réunit une armée de 700.000 hommes et franchit la frontière en septembre 1219. En 1210, il prend Boukhara et réduit la garnison au silence, avant de marcher sur Samarkand. La cité capitule le 17 mars. On épargne le personnel des mosquées, les membres des congrégations religieuses et les artistes.

La Transoxiane était conquise, mais les campagnes n’ont pas pacifiées la région. Les brigands et les patriotes ont pris le maquis. Le Chah s’est replié avec son armée. Gengis lance contre lui Djebe et Sübötei. Sans intendance, sans véritables connaissances géographiques du pays, les Mongols parcourent en quatre ans plus de 20.000 kilomètres. Ils atteignent le Caucase et battent les Géorgiens.

Le fils de Muhammad, Djelal al-Din, harcèle les Mongols. Il cherche à délivrer Urgentch assiégée et qui ne cède pas. Gengis comprend qu’il n’aura jamais la paix tant qu’Djelal al-Din est vivant. La campagne d’Afghanistan est la plus sanglante et la plus meurtrière. Les villes sont détruites et les habitants massacrés. Bactres est détruite en février 1211. Gengis espère ainsi dissuader toutes les futures révoltes contre lui. Il repousse l’armée de Djelal sur les rives de l’Indus. L’armée adverse est battue, mais Djelal réussit à trouver refuge en Inde. Gengis refuse de le poursuivre.
Afin de rentrer chez lui, il reprend la route de l’Afghanistan et s’emploie à pacifier le pays. En une année, le recensement est effectué, les registres rédigés, les taxes levées et les postes et relais ouverts.


Dernière campagne
A peine rentré en 1225, Gengis prépare une nouvelle campagne militaire, afin de châtier la défection des Tangut au début de la guerre du Khwarezm. Lors d’une chasse à l’hermine, il est désarçonné. On doit le relever. Il souffre de douleurs dans l’abdomen. Pendant la nuit, il est pris d’une forte fièvre. On lui conseille de se replier, mais il refuse. Néanmoins, il accepte d’ouvrir des négociations qui échouent.

Remis sur pied, Gengis reprend la tête de son armée et envahit Ningxia, la capitale Tangut. Laissant ses troupes devant la ville, il s’empare de Lanzhou et Si-Ning. Les cavaliers mongols dévastent tout sur leur passage. Le roi des Tangut Li Yan se résigne à capituler. Il se rend au camp de Gengis, mais ne peut s’entretenir avec le Grand Khan.

Gengis Khan s’éteint le 18 aout 1227, d’une hémorragie intestinale. On chante l’éloge funèbre du défunt, avant de ramener son corps en Mongolie et de l’enterrer au pied d’un arbre majestueux.



L’héritage
Gengis a quatre fils : Djötchi, Djaghataï, Ogödei et Tului. Djötchi étant mort assez jeune c’est Batu, son demi-frère qui hérite de ses droits. Les quatre frères se partagent l’empire de leur père. Batu s’accapare la partie occidentale connu sous le nom de Horde d’Or. Djaghataï règne la partie centrale et Ogödei sur les régions iraniennes. Quant à Tului, il assume le gouvernement central.

Gengis Khan laisse une grande armée (1 million d’homes) toute dévouée et encore invaincue. L’élite est composée de Mongols. Il laisse surtout l’idée, selon laquelle pour que la paix règne, il faut rassembler tous les peuples au sein d’un même empire. Comme il n’y a qu’un seul dieu il ne peut y avoir qu’un seul roi. Cette idée n’était pas nouvelle ni chez les Mongols, ni chez les Turcs. Mais jamais auparavant, elle n’a été appliquée avec une telle force, ni menée aussi loin. Les successeurs de Gengis Khan auront toujours à cœur d’achever l’œuvre de leur ancêtre en se faisant les promoteurs de la paix universelle.








"De même il n'y a qu'un dieu invisible dans le ciel, il n'y a qu'un maitre sur la terre. C'est moi, Gengis Khan."
Gengis Khan


Source :
Texte : Roux. Jean Paul : Histoire de l'Asie Centrale
Images : historiasdelahistoria.mypodcast.com; Civilization 4