vendredi 15 octobre 2010

Les Aztèques


Tlula ou les mirages de la civilisation
Les Toltèques de Tula demeureront à jamais les initiateurs des tous les raffinements de la civilisation, matériels, intellectuels et technologiques. Ils vénèrent de nombreuses divinités, parmi lesquelles le dieu Quetzalcoatl, dont le prêtre du même nom célèbre le culte et gouverne Tula. L'empire Toltèque est composé de sédentaires et de nomades venant du Nord. Ces derniers s'intègrent parfaitement. Chaque tribu conserve son organisme, ses traditions et ses cultes, mais c'est dans les cités que vivent les élites (politiques, militaires, religieuses).

Pour des raisons mystérieuses, la domination de Tula s'effondre vers le milieu du XIIe siècle, sans doute à cause d'une arrivée trop massive de nomades. Selon la légende, les rivalités internes auraient poussé le roi-prêtre à quitter la ville avec ses partisans. Une partie émigre vers la vallée de Mexico plus à l'Ouest, tandis que d'autres descendent davantage vers le Sud.

Les dirigeants de ces bandes se considèrent comme les interlocuteurs obligés de leurs dieux. Ils reçoivent l'énergie nécessaire pour guider leur peuple. Ces grandes migrations par vagues successives sont la source de l'éclatement politique de l'Amérique Centrale. Ces états sont sans cesse en concurrence au cours du XIIIe siècle. Chaque dirigeant cherche à se rattacher aux vieilles lignes Toltèques.

Un autre groupe commence à émerger à la même époque, venant d'une cité qui a été détruite nommée Atzlan d'où le nom Aztèque appelée dans les textes anciens "Mexicas". Guidé par son dieu, le groupe aurait entrepris une longue migration depuis les steppes du Nord, migration balayée par des dissensions et de fortes tensions. Les exécutions massives qui pallièrent à ce phénomène, préfigurent la pratique à grande échelle des sacrifices humains. Arrivant dans la vallée de Mexico et désirant s'y installer, les Aztèques se heurtent à la cité-état d'Atzcapotzalco et furent chassés plus au Sud, où ils reçurent l'hospitalité de la cité de Culhuacan. Ils seront chassés plusieurs années plus tard et se réfugient sur un îlot où ils s'installent.

En 1325, les Aztèques fondent la ville de Tenochtitlan (l'actuelle Mexico), puis la ville de Tlatcholco. L'agriculture et l'irrigation se développent, mais le manque de matières premières comme le bois et la pierre va amener les Aztèques à établir des liens avec l'extérieur. Toutefois, les Aztèques doivent faire face à la tribu dominante des Atzcapotzalco, dont le roi a réussi à unifier plusieurs tribus se créant ainsi un vaste royaume. Les Aztèques préfèrent nouer des relations diplomatiques en versant un tribut. Face à ce royaume, il existe celui de Texcoco au Nord-ouest de Mexico. Ce royaume tire sa puissance de l'extraction des pierres précieuses et développent des corporations d'artisans et d'orfèvre.

Au début du XVe siècle, une guerre éclate entre Texcoco et Atzcapotzalco qui tourne au désavantage des premiers. Les Aztèques alliés des seconds annexèrent une partie du territoire conquis. Toutefois en 1426, les aztèques s'allient avec Texcoco et Tacuba détruisant ainsi le royaume d'Atzcapotzalco. C'est de cette triple alliance que naît l'empire aztèque.

Les bâtisseurs d'empire
L'année 1450 est marquée par de terribles disettes où les aztèques voient la fin d'un cycle de 52 ans, qui correspond à un moment de bouleversements cosmogoniques. Afin d'apaiser le courroux divin, il s'agit de mener régulièrement des campagnes pour capturer le plus de prisonnier possible pour les offrir aux dieux. C'est ce qu'on appelle "la guerre fleurie". Toutefois, la dimension spirituelle recoupe très souvent des objectifs stratégiques ou commerciaux. S'ensuit toute une série de bataille entre les Aztèques et les peuples des vallées du Sud regorgeant de coton et de pierres précieuses. Les troupes de Moctezuma Ier (empereur aztèque) envahissent la cité de Coixtlahuaca, puis les régions orientales du Golfe du Mexique. La perception des tributs, le soin mis à s'assurer des bases stratégiques sur les axes commerciaux révèlent bien combien ce sont les préoccupations économiques, qui guident les entreprises militaires.

Dans les grandes villes aztèques, une étiquette complexe rythme dorénavant l'existence du souverain et des courtisans. Le rang est partout marqué par des parures et des versements, dont le luxe et le raffinement définissent la fonction de leur porteur. Le port des vêtements et la longueur des manteaux sont fixés par des coutumes strictes. C'est une marque de distinction sociale. Toutefois, ce système n'est pas totalement fermé. Les guerriers peuvent prétendre se rapprocher de l'élite. Ces conventions ont pour objectif d'intégrer par tous les moyens, l'individu dans la société et de gommer les particularités en assignant à chacun un rôle et une apparence. Sous Moctezuma Ier, des livres de lois portant sur un grand nombre de sujet sont rédigés, dans lesquels les nobles sont plus sévèrement châtiés, car ce sont à eux de donner l'exemple.

L'implantation aztèque dans les provinces conquises reste faible. Les occupants laissent en place les élites locales, les cultes, les institutions et les coutumes. Par ailleurs, il n'existe pas véritablement d'armée. Les hommes sont levés au besoin des campagnes. Il existe juste une caste des guerriers. De plus, les communications dans l'empire restent difficiles. En effet, les Aztèques n'utilisent ni la mule, ni le cheval et ne connaissent pas la roue. Tout est transporté à dos d'homme. L'image de la Triple Alliance est à la fois celle d'une puissance répressive, fondée sur la violence et celle d'un pouvoir plus subtil jouant sur la négociation autant que sur la terreur. L'empire aztèque ressemble donc à une immense toile d'araignée dont le centre est occupé par la Triple Alliance et dont les réseaux s'articulent sur des relations matrimoniales, de services, d'échanges, de dépendances et de chantages. L'ensemble est assez souple et adapté à un pouvoir, qui ne peut compter ni sur des moyens de transports efficaces, ni sur cet instrument de communication rapide que constitue l'écriture alphabétique. Les relations se font à partir de tribut de toute sorte. Ceux ci sont ensuite utilisés pour les fêtes religieuses, l'administration, les guerres, les travaux d'aménagement des villes et le commerce.

Les Aztèques à la conquête du monde
En 1472, la Triple Alliance se disloque. Tlatelolco prend les armes, mais la rébellion est réprimandée dans le sang et la cité perd son autonomie. Porté au pouvoir en 1486, Ahuitzotl commence par mener plusieurs campagnes contre d'autres provinces révoltées.

Les Aztèques augmentent dés lors le nombre de sacrifice et furent comme obsédés par l'enjeu d'opérer des sacrifices de masses. Il existe plusieurs raisons à ce phénomène. Tout d'abord, une raison spirituelle. En effet, les dieux aztèques sont mortels. Il faut donc continuellement les nourrir et ceci dans le but de regénérer le cosmos et d'aider la course quotidienne du soleil. Il faut également obtenir le retour des pluies nécessaires aux récoltes. Ensuite, les sacrifices sont un instrument du gouvernement pour soutenir une politique de terreur et d'éliminer physiquement les vaincus. Les cérémonies de sacrifices sont des spectacles grandioses et publics. Le sacrifié offre son corps aux dieux, pour permettre grandioses au cycle de la vie de continuer.

L'empereur Ahuitzotl commence ses campagnes vers le Sud. Au fil des conquêtes des colons s'installent. Ils ont pour mission de développer les plantations et de monter la garde aux frontières. Poursuivant son expansion, Ahuitzotl occupe les rivages du Pacifique à partir de 1491. En 1500, la riche cité de Tehuantepec réclame l'aide d'Ahuitzotl contre le royaume de Soconusco, l'actuel Guatemala. Malgré les problèmes de logistique, l'empereur parvient à s'emparer de la cité. Toutefois, la progression des troupes aztèques s'arrêtera là, car les armées doivent lutter sur plusieurs fronts à la fois.

Pour faire face à l'accroissement de la population, il s'avère nécessaire de développer la production agricole. Cela nécessite de grands travaux d'irrigation. Grâce au réseau de canalisations, les villes se dotent de somptueux jardins. L'empire repose sur la fidélité des dirigeants locaux. Les Aztèques sont donc loin de contrôler les régions conquises faute de moyens et d'hommes. Des territoires continuent de leur échapper et mènent des raids. Il s'agit par exemple du royaume Tlaxcala ou les tribus Tarasques plus au Nord. Enfin, le degré d'intégration des populations étrangères reste faible et le risque de rébellion important.

En 1502, Moctezuma II arrive au pouvoir. Il commence par prendre des mesures radicales pour modifier le recrutement de son administration. Les responsables de son père Ahuitzotl sont éliminés et remplacés par des jeunes gens triés sur le volet. Le monopole de la noblesse se resserre d'avantage, tandis qu'autour du souverain l'étiquette se fait plus stricte. Le pouvoir change et tend vers un absolutisme. A l'extérieur Moctezuma II se consacre essentiellement à la soumission et au contrôle des provinces proches.

Pour vaincre ses ennemis, Moctezuma II cesse les échanges ritualisés et équilibrés de la guerre fleurie, mais entre 1508 et 1515, il essuie de nombreuses défaites. Toutefois, sous son règne l'empire fait plus de 200 000 mille kilomètres carré et compte plusieurs millions d'habitants. Tenochtitlan la capitale regroupe 300 000 personnes.

Le choc de deux mondes
L'émergence dans le quotidien de forces extra humaines de nature maléfique, surgies hors du cadre visualisés du rapport avec les dieux, préoccupe au premier chef les sociétés. Une comète apparaît dans le ciel. Les prêtres prédisent de mauvais présages, relayés par des inondations et surtout par l'incendie du temple de la déesse Toci.

En 1517, une première expédition espagnole touche les côtes du Yucatan. L'année suivante une deuxième expédition remonte jusqu'à Veracruz. Les nouveaux venus sont biens étranges et les Aztèques s'interrogent sur les raisons de leur soudaine apparition. Certains pensent que c'est le dieu Quetzalcóatl, dont le retour était annoncé depuis plusieurs siècles. Moctezuma II ne sait quelle attitude adopter, les accueillir ou les attaquer ? Peut être est il d'emblée persuadé que sa fin est inéluctable, ce qui expliquerait ses continuelles volte-face, ses oscillations entre révoltes et résignation. Pendant ce temps, les troupes espagnoles continuent à explorer les terres et se heurtent à des tribus indigènes. Mais bientôt, ces tribus frappés par la puissance de feu et l'acharnement des Espagnols, décident de les appuyer contre les Aztèques. Le chef espagnol nommé Cortés a tôt fait de saisir le profit qu'il peut tirer de cette situation.

L'œil de Cortés ne laisse échapper aucun des signes qui révèlent la faiblesse des Aztèques : l'infériorité de leurs armes, l'attitude hésitante de Moctezuma II et le mécontentement des peuples soumis. Les Espagnols parviennent ainsi à créer une colonie autour de Veracruz. Cortés est accueilli en grande pompe par Moctezuma II à Tenochtitlan. L'empereur évoque le pouvoir qu'il détient des cieux et qu'il est prêt à déposer aux dieux. Cortés lui explique, qu'il est venu au nom d'un puissant seigneur qui règne sur une grande partie du monde et d'un dieu unique et véritable. De cet entretien, ce sont deux visions différentes de la situation qui en sort.

Le rapport de force jouant en faveur des Aztèques, certains conquistadores veulent frapper un grand coup. Ils profitent des danses rituelles en l'honneur du dieu Huitzilopochtli, pour éliminer toutes les autorités militaires et religieuses. Moctezuma II est emprisonné et assassiné. Les survivants de l'aristocratie ne baissent pas les bras et sont plus que jamais résolus à en finir avec les Espagnols. Le nouvel empereur Cuauhtemoc fait encercler la capitale aux mains des Espagnols. Cortés et ses hommes parviennent à s'enfuir durant la nuit et à rejoindre Veracruz. Préparant la contre offensive, Cortés continue d'exploiter les dissensions locales. Les tribus préférant s'allier aux Espagnols contre les Aztèques. Quelques mois plus tard, c'est au tour de Cortés d'assiéger la capitale. Le général espagnol peut compter sur l'appui de plusieurs milliers d'indigène et fait construire une flottille pour s'assurer le contrôle de la lagune. Le siège dure trois mois et le 13 août 1521, la cité tombe et avec elle l'empire aztèque. Cuauhtemoc est exécuté et Cortés devient gouverneur de la Nouvelle Espagne.


"Le chemin que nous devons suivre en ce monde est étroit et haut placé. Si nous nous en écartons, nous tombons dans un précipice profond."
Proverbe aztèque


Source
Texte : GRUNZINSKIGRUNZINSKI. Serge, Le Rêve brisé de l'empire aztèque
Image : des-gens.net

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