lundi 22 novembre 2010

La Guerre de Vendée


La France entre en Révolution

En Mai 1789, le roi Louis XVI convoque les Etats Généraux. Des espoirs de réforme semblent permis. Jusque dans les plus petites bourgades, des groupes se constituent, pour exprimer un désir de changent, mais la déception est grande et la révolution éclate en ce mois de juillet 1789. L'Assemblée Nationale entreprend aussitôt une série importante de réformes, dont une des premières est l'abolition des privilèges et des distinctions juridiques. Les évènements parisiens dépassent rapidement les frontières de la ville et se reproduisent dans toute la France. Tous les cadres de vie auxquels les ruraux étaient habitués viennent de changer en deux années.

En règle générale, dans l'Ouest comme dans tous le pays, les ruraux sont incompris des citadins. Ils sont pour la plupart analphabètes et ne parlent que rarement français. Toutefois, ils sont intégrés dans les secteurs économiques, notamment avec les foires. A partir de 1791, les paysans de l'Ouest sont mécontents de l'augmentation des impôts nouvellement créés. Ils attendaient quelques avantages de la confiscation des biens du clergé, vendus au profit de l'Etat sous le nom de "biens nationaux". Mais les acheteurs privilégiés sont les propriétaires urbains, qui saisissent l'occasion pour accroitre leurs biens au détriment des paysans.

Une autre source de querelle concerne la religion et notamment la question entre prêtres réfractaires et prêtres assermentés. Les habitants des campagnes accueillent très mal ces nouveaux prêtres qui leur sont inconnus. Ceux ci reçoivent des menaces et sont parfois violentés. La Révolution provoque une opposition rurale particulièrement vive dans l'Ouest. Les tensions vont régulièrement augmentées entre 1791 et 1792 pour aboutir à une lutte armée.


La montée des résistantes
La guerre contre l'Autriche déclarée en 1793, force la France à recruter dans les campagnes plus de 300.000 hommes. L'effort demandé à chacune des communes n'est pas très important, mais il rappelle des procédés employés par la royauté et que les paysans ne supportaient que difficilement, surtout que le choix s'effectue en priorité parmi ceux qui sont restés jusque là à l'écart de l'engouement révolutionnaire.

Partout en France, des émeutes éclatent. La politique menée par les Montagnards dirigés par Robespierre, ont réussi à contenir les émeutes partout sauf dans l'Ouest. En Bretagne, des milliers de ruraux prennent les armes contre les bleus, qui sont obligés de se réfugier dans les grandes villes.

Dans le Finistère, le général Conclaux mène la répression. Les meneurs sont exécutés et les communes lourdement taxées. Il faut à tout prix empêcher l'insurrection de reprendre. L'efficacité de ces méthodes est incontestable. L'ordre est rétabli dès la fin du mois de mars. Le mécontentement ne disparait pas, mais la répression empêche la poursuite de la révolte. Une colonne de 3.000 hommes sous les ordres de Macé est envoyée à Nantes. Les soldats repoussent facilement les insurgés, mais le 19 juillet 1793, ils subissent une lourde défaite. Devant cette incompréhension, toutes les thèses sont avancées. Soupçonné de trahison, Conclaux est guillotiné.

Cet évènement laisse le champ libre aux autres insurgés. La situation prend ainsi des proportions considérables et la région tend à échapper au contrôle du gouvernement.


La Vendée des blancs
L'armée composée essentiellement de paysans n'est pas une armée stable. Lors des déplacements, s'opère un véritable roulement, qui s'instaure entre ceux qui quittent leur village lorsque l'armée s'approche et ceux qui rentrent quand l'armée s'éloigne trop. Cependant, le noyau est composé de soldats permanents. Ces derniers sont soit des déserteurs, soit des membres de l'ancienne armée royale.

L'armée vendéenne joue sur l'effet de masse pour faire fuir les gardes républicaines. Les batailles se déroulent toujours de la même façon. Les armées républicaines sont amenées dans des traquenards et sont mises en déboute. Les chefs de la rébellion ont tous été désignés par leurs troupes, soit parce qu'ils ont une compétence militaire, soit par leur opposition républicaine. On citera par exemple Cathelineau, Joly, Bonchamps, Sapinaud et Charrette. Ce sont en règle générale des petits nobles. L'autorité de ces chefs est limitée par la nature de l'armée. Ils n'arrivent guère à les manœuvrer et ne sont jamais sûrs que leurs ordres soient exécutés. Par ailleurs, ils doivent accepter les capitaines qui sont élus. Chaque chef doit constamment faire ses preuves pour garder la confiance de ses soldats et de ses pairs. De plus entre les nobles et les roturiers, il existe de fortes dissensions.

Dès le début des insurrections se sont installés dans les communes des comités provisoires, souvent composés d'anciens conseillers municipaux et des maires. On y trouve aussi des femmes. Ces conseils surveillent les récoltes, font arrêter les républicains et organisent la garde des villages. Pour coordonner les actions, les vendéens mettent en place un conseil supérieur dans la petite ville de Chatillon clans les Deux Sèvres. C'est un véritable gouvernement qui réorganise le clergé et remet en vigueur les lois de la monarchie. Pour financer les combats, le conseil supérieur récupère l'argent pris sur les républicains et émet ses propres billets de monnaie.

La révolte initiale improvisée par des masses paysannes, qui pour des raisons sociales, religieuses et politiques, étaient hostiles à la République, regroupe des individus et des groupes clairement contre révolutionnaire et voulant restaurer l'Ancien Régime. Toutes les petites villes tombent facilement aux masses des vendéens. Dès le mois d'avril 1793, l'intérieur des terres leur appartient. Sur les côtes, la situation n'est pas la même. Les grandes villes ont d'importantes garnisons et de puissantes fortifications. A l'Est, la situation est meilleure. Les villes de Saumur, La Flèche et Chinon tombent facilement. Les armées vendéennes se regroupent devant Nantes, mais la ville résiste. Durant l'été, ils échouent de nouveau devant Luçon.

Une fois la bataille unie, les paysans rentrent chez eux et les chefs ont du mal à garder les territoires conquis. Sans cesse de nouvelles troupes républicaines arrivent. Les victoires royalistes ne sont jamais définitives.


Le désarroi des bleus
Le gouvernement tente de rassembler une armée pour mettre un terme définitif à la révolte. Des soldats arrivent de toute la France, mais leur valeur est très inégale. La plupart ne savent ni manœuvrer, ni utiliser d'armes de guerre. Leur équipement est médiocre voire inexistant. De plus, ils ne se sont engagés que pour quelques semaines. Les femmes sont également présentes. Elles assurent l'intérim.

Les conditions de vie sont difficiles : pluie, vent, boue, manque de nourriture et un sentiment de peur lié au bocage. Dans de telles conditions, nombre de soldats tombent malades et se retrouvent dans des hôpitaux de fortune. La désertion est alors le fléau ordinaire de telles situations. Au découragement de beaucoup, s'ajoutent les calculs de quelqu'un. En effet, certains se sont engagés pour rejoindre les troupes vendéennes. Les soldats sont des citoyens-soldats. Ils élisent leurs officiers, contestent les ordres et rechignent à obéir aux généraux qui limitent les pillages.

Les troupes républicaines sont commandées d'abord par des officiers qui ont été formés dans l'armée royale. D'autres profitent de la révolution pour acquérir un grade. Ces chefs sont constamment sous surveillance. Les représentants en mission délégués par Paris depuis 1793 dans le pays, ont tout pouvoir y compris celui de destituer sur le champ des généraux suspects. L'obsession du complot explique toujours que la moindre défaite soit interprétée comme une trahison. Un grand nombre de généraux sont arrêtés et guillotinés.

La médiocrité des troupes, les incertitudes, les rivalités qui affaiblissent le commandement du côté des républicains expliquent les victoires faciles des vendéens. Cette réalité n'est évidemment pas prise en compte par les révolutionnaires, qui enveniment les contre révolutionnaires embusqués dans l'armée considère comme la menace majeure qui pèse sur la Révolution.


La guerre totale
La victoire des Montagnards amène l'adoption du principe de destruction complète de la Vendée. Les habitants patriotes sont poussés hors de la région et doivent se réfugier dans les zones favorables à la Révolution. Les Vendéens divisés ont de plus en plus de mal à résister à la pression qui s'exerce sur eux. Ils se replient au Nord vers Cholet, où a lieu une terrible bataille le 17 octobre. Entre 60.000 et 100.000 personnes partent pour la traversée de Galenne vers la Loire. Ce convoi énorme et lent est sous estimé par les républicains. Les détachements envoyés sont repoussés sans problème. Les généraux vendéens souhaitent gagner la Bretagne encore très royaliste et qui peut accueillir des troupes anglaises, mais pour cela, il leur faut un port. Le 14 novembre 1793, ils attaquent Granville, mais doivent vite abandonner.

Devant ces défaites, les soldats désirent rentrer, mais les armées républicaines sous les ordres de Marceau, empêchent la retraite. Les deux troupes s'affrontent à Pontorson et à Antrain. Les Vendéens parviennent à passer non sans mal. Après avoir subi une défaite à Angers, ils atteignent la Flèche. Ils doivent très vite quitter la ville, car leur ennemi les talonne. Ils retraversent la Loire. Suivis et harcelés par l'armée républicaine, les Vendéens repartent vers l'Ouest en évitant les grandes villes trop bien défendues. Fatiguées et affaiblies par le départ de groupes d'hommes. L'armée vendéenne subit une nouvelle défaite le 23 décembre. Les prisonniers sont exécutés et les déserteurs traqués. En janvier 1794, le général Turreau reprend l'île de Noirmoutier, un des derniers grands bastions royalistes.

En 1794, il ne reste plus d'armée, mais seulement des petites bandes organisées. Les républicains occupent toute la région. La plupart des généraux tentent de ramener la paix en empêchant les exécutions sommaires et les pillages. En octobre 1794, le représentant Carrier est envoyé à Nantes. Sa tâche est double : nourrir la centaine de milliers d'habitants de la ville et s'occuper de tous les prisonniers vendéens retenus dans ses prisons. C'est pourquoi, il met en place des réquisitions de vivres et fait fusiller ou noyer un grand nombre d'insurgés. Dans toute la région, des commissions militaires jugent les Vendéens avec la même rigueur. Par ailleurs, Turreau est chargé d'appliquer le principe de destruction. Les soldats se répandent partout, chassant, tuant tous les habitants qu'ils rencontrent, brûlant les villages et les récoltes. Ils sont appelés "les colonnes infernales". Elles dureront toute l'année.

La brutalité des troupes républicaines ne laisse pas le choix aux paysans. Ils sont obligés de se battre ou de mourir. Les Vendéens recommencent ainsi à mener une guerre d'embuscade. Ils s'entourent d'états-majors, créent des casernes, des hôpitaux et des caches d'armes. Quatre généraux en sont à la base : Charrette, Stylet, Sapinaud et Marigny. Toutefois, le succès vendéen est plus apparent que réel. Les troupes ne rassemblent que quelques milliers d'hommes et les chefs restent divisés.

La chute des Montagnards met fin à la politique de terreur. Le nouveau gouvernement désire ramener une paix véritable. Des négociations secrètes sont conduites entre Charrette et Ruelle. Les négociations sont dures. Les Vendéens doivent reconnaître la République. Les Républicains doivent s'engager à laisser libre le culte des prêtres, à ne pas lever de soldats et d'impôts pendant dix ans. Finalement, la paix est signée en mai 1795.


La Vendée brisée
La guerre reprend en Bretagne dès le mois de juin. Les chefs chouans ont réussi à mettre au point avec les Anglais un débarquement, mais les forces républicaines de Hoche réduisent ce projet à néant. Charrette soutenu par les anglais et le Comte d'Artois, futur Charles X, reprend la lutte en Vendée. Ce sont d'avantage des luttes politiques avec des enjeux diplomatiques. Les paysans ne suivent guère cet enthousiasme.

C'est Hoche qui prend en charge l'armée républicaine dans l'Ouest. Il fait la différence entre les chefs et leurs idéaux politiques et les paysans avec leur désir de maintenir leurs traditions sociales et religieuses. La stratégie est claire. Il faut attaquer les bandes armées sans relâche. Une grande partie des Vendéens aspirent à la paix et se rendent compte que la poursuite de la guerre est impossible. Charrette et Stofflet sont les deux derniers chefs vendéens à résister. Abandonnés par la plupart de leurs hommes, ne disposant plus de cantonnement, errant de cache en cache, ils sont à la merci des embuscades et des dénonciations. Le premier est capturé en février 1796 et fusillé, le deuxième perd une bataille près de Nantes et subit le même sort le 29 mars.

La guerre est donc officiellement terminée. Toutefois, les populations qui ont pris le parti des républicains sont mal acceptées et subissent des règlements de compte. La police surveille de près la population craignant un renouveau du mouvement par l'influence des Anglais ou des chouans. En 1799, la situation est de nouveau tendue à cause de la religion. Napoléon Ier met fin à cette situation en signant le Concordat et abat la chouannerie en arrêtant Cadoudal. Le retour de Louis XVIII pacifie la région et érige la légende de la Vendée.


Source :
Texte : MARTIN. Jean Clément : La Guerre de Vendée
Image : memo.fr

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